Quelque part au fond de mon cerveau, quelque part dans un coin reculé où je ne vais heureusement presque jamais, quelque part il y a comme un nuage sombre.
Un souvenir qui ne s'efface pas, souvenir d'un film qui a l'immonde privilège d'être le niveau zéro, le plus bas sur mon échelle de valeur, l'étalonnage vertigineux qui me pousse à la mansuétude devant tout le reste.
Je ne me souviens pas bien de toi, AI, je ne t'ai vu qu'une fois, dans un cinéma à l'écran large et au public jeune, et je sais que je ne te reverrai jamais. Je ferai tout ce qu'il faut pour m'éviter de nouveau ce calvaire de deux heures trente, quand elles passent on croiraient qu'elles sont mille.
Je me souviens mal, c'est vrai, mais c'est encore trop.
Je me souviens d'avoir hésité avant d'entrer dans le cinéma, et puis sans m'attendre à grand-chose d'avoir choisi de te donner une chance, en hommage au réalisateur de quelques films cultes d'il y a 20 ans.
Je me souviens de ton début, du didactisme à vomir de ta première scène, martelé à travers un artifice lapidé par n'importe quelle méthode de scénario. Quelques minutes après le début, j'ai compris ma première erreur : d'être venu. Ensuite, j'ai commis la seconde : je suis resté.
Je devrais m'en prendre à moi ?
Non. C'est toi, l'insulte à l'intelligence, à la finesse, au cinéma.
Je me souviens de la suite, de l'hypocrisie de la peinture petit-bourgeois rose bonbon du futur, de la cellule familiale d'une Amérique qui se ment à elle-même.
Je me souviens de ce gosse propret, qui n'hurle jamais, ne casse pas ces jouets et qui est gentil avec sa maman, fantasme rose-bonbon pour émouvoir les fillettes pré-Barbie et leurs mères lobotomisées, manipulation du public à travers des ficelles comme des cordages quand le gosse, évidemment, se retrouve tout seul et tout triste... comme Bambi !
Je me souviens encore de la suite, toujours avec ce didactisme insultant même dans les symboles, avec ce robot qui a de l'espoir et qui dépasse son programme... a-t-il une âme ? Comment s'intéresser à la question au milieu de ce matraquage de clichés ?
Je me souviens du moment quand le film semblait s'arrêter, pour terminer tel un simple ratage tandis que le robot se figeait dans l'éternité.
Mais surtout, je me souviens que le film alors a continué, dans un épilogue qui n'en finissait pas, crétin, dégoulinant de guimauve, pour rassurer la ménagère attendrie comme une escalope, rien ne nous sera épargné, et on assiste donc sans voix à cette sorte de final de 2001 reformaté par Walt Disney, pour l'apologie ultime des bons sentiments à la con.
Khaali
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le 11 oct. 2010

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