Sortie cinéma confidentielle, exploitation vidéo peu reluisante, A la Limite du Cauchemar (Butcher, Baker, Nightmare Maker) fait parti de cette masse de petits films oubliés au fil du temps mais qui ne méritent pas pour autant de totalement disparaître de l'esprit de cinéphages. Le film est réalisé par William Asher, un spécialiste du teenage movie tendance surf et plage dans les années 60. A la Limite du Cauchemar est un thriller horrifique et psychologique à la mise en scène bien peu inspirée mais qui dégage tout de même une étrange ambiance tout à la fois grotesque dans ses excès et abrasive dans ses thématiques sous-jacentes.
A La limite du Cauchemar nous raconte donc l'histoire d'une brave tata qui élève seul son neveu depuis la mort tragique de ses parents dans un accident de voiture. Mais après 14 ans de cohabitation forcée le petit bambin devenu jeune adulte souhaite quitter le nid pour vivre sa propre vie auprès de sa nouvelle petite amie. Mais tata Cheryl ne l'entend pas de cette oreille et fera tout pour conserver l'adolescent sous son aile aussi protectrice que malsaine.
A La Limite du Cauchemar n'est clairement pas un grand film en matière de mise en scène, le film est d'une facture très classique et sans éclats, presque télévisuelle par de nombreux aspects, mais même si il débute par une chouette scène d'accident de voiture, le long métrage de William Asher tient plutôt bien la route. La petite singularité du film qui en fait tout le délicieux piment tient dans la notion diffuse de pulsions obsessionnelles refoulées à fortes connotation sexuelles qui animent certains personnages. Car dans cette volonté maladive de vouloirs conserver son petit neveu sous son aile au relent de dessous de bras de vieille fille, notre chère tante Cheryl masque à peine un désir incestueux accompagné d'une emprise quasiment castratrice. Décidément le jeune Billy n'a pas de chance puisque une fois embarqué dans une sordide manipulation meurtrière organisé par sa tante il va devoir se coltiner un flic sévèrement burné et légèrement obsédé par une haine viscérale du pédé qui voit en lui un coupable idéal en imaginant une rivalité amoureuse contre nature avec son professeur de basket. Et franchement tout ce contexte un peu malsain de deux obsession qui viennent prendre un étau un pauvre jeune mec qui souhaite juste vivre sa vie en s'extirpant d'un nid devenu trop angoissant donne au film une dimension assez singulière et même un peu glauque. La haine viscérale de ce flic obtus et crétin envers les homosexuelles va transformer Billy en coupable idéal quand bien même il n'est aucunement gay et l'amour possessif et manipulateur de sa tante sombrant lentement vers la folie vont en faire une victime tout aussi parfaite.
Mais le plus gros atout du film reste la présence de Susan Tyrell dans le rôle de la tata Cheryl Roberts . La comédienne vue notamment dans Cry Baby, Angel ou Forbidden Zone est vraiment formidable dans le rôle de cette mère de substitution, tactile jusqu'au gestes déplacés, provocatrice et exubérante dans sa sexualité refoulée, cynique et manipulatrice en étirant jusqu'à la tragédie la corde sensible, machiavélique et dominatrice jusqu'à l'homicide. Et lorsque vers la fin du film le personnage vrille dans une forme de folie furieuse et meurtrière, Susan Tyrell en fait des caisses mais c'est un grand bonheur de la voir basculer dans le grotesque en devenant un animal de prédation prêt à tout pour protéger ces petits quitte à les bouffer. Forcément plus en retrait et plus lisse, le comédien Jimmy McNichol dans le rôle de Billy ne marquera pas trop les esprits mais propose une interprétation solide qui trouvera son point d'orgue lors du final durant lequel le personnage craquera totalement perdu entre la tyrannie meurtrière de sa tante et l'obsession de ce flic à en faire un dangereux dépravé. Ce flic bourru, grande gueule, étroit d'esprit est interprété par l'excellent Bo Svensson vu chez Tarantino ( kill Bill Vol II – Inglorious Basterds) mais aussi dans une flopée de film bis remplis de testostérones comme Thunder -Maniac Killer ou Blood Commando.
Même si sa forme manque un peu d'audace et de folie et que l'intrigue aurait sans doute gagner à ne pas révéler trop tôt certaines ficelles de son récit , A La Limite Du Cauchemar reste une petite série B aux nombreux sous texte un peu malsain et à l'ambiance trouble. Un film perdu qui sans devoir être porté aux nues mérite de ne pas être totalement oublié.