À nos amours par Charlotte Nivet
Nous sommes dès la première scène décontenancé par l'apparition de Sandrine Bonnaire. Elle joue l'actrice et répète on ne badine pas avec l'amour. ça nous prend au ventre, on est surpris, on désire qu'elle parle plus, encore, sa manière de bouger les lèvres, son aisance naturelle, c'est inédit. Je me suis retrouvée complètement désorientée, Pialat nous fait désirer son héroïne, après être tombé amoureux d'elle : car il faut tomber amoureux des acteurs pour les faire jouer aussi passionnément.
ce qui m'a sans doute le plus frappée dans ce film est la présence d'une improvisation presque constante : nottament la discussion entre Suzanne et son père Pialat, complètement improvisée. C'est une scène naturelle mais pas à la manière d'un reportage, c'est plus fort que ça. Pialat attend presque tout du tournage, se nourrit de vie et s'abreuve des expressions des autres autour de lui, qu'il emprunte.
On peut malgré tout lui reprocher son manque de cohérance au sein du récit, A nos amours est un film sans fil dans lequel on peut se retrouver aussi perdu et livré à nous-même que l'héroïne : l'intrigue n'est pas posée, il n'y a pas de repères temporels auxquels se raccrocher. Dès le départ du père, la famille se laisse aller à ses névroses et s'ensuit une série de scènes décousues et sans liens.
Suzanne aime les hommes, les désirent. Elle ne désire pas celui qu'elle aime, c'est peut-être l'intrigue principale non résolue du film.
Du reste, la jeunesse que dégage Sandrine Bonnaire et la mise en scène de Pialat nous montre un film vivant.