Le titre A Taxi Driver (2017) inspire instinctivement Martin Scorsese, mais, ici, c’est le sud-coréen Jang Hun aux commandes et il faut admettre que ce dernier est tout à fait à la hauteur. D’un tout autre registre que Taxi Driver (1976), le film se présente d’abord comme sympathique, au comique léger, à la limite du burlesque, avant de s’enraciner de plus en plus profondément dans la violence et la noirceur de la réalité de l’époque. En effet, Kim Sa-Bok, chauffeur de taxi lambda à Séoul, cherche, au début du film, à se faire de l’argent pour subvenir à ses besoins, tout en gardant le sens de l’humour et le sourire, avant d’apprendre qu’un étranger est prêt à donner une bonne somme d’argent pour être emmené à Gwangju.
C’est ce « premier acte », plein de vie, à travers le jeu de Song Kang-ho (que l’on retrouve dans les chefs d’oeuvres de Boon Jong-Ho comme Memories of Murder, The Host ou plus recement Parasite) avec sa bonhomie inhérente et la complexité de son jeu, qui rend le spectateur totalement émerveillé, même si à certain moment, on vire un peu dans le topos, mais ce dernier n’est pas suffisant pour caractériser le film ainsi.
Jürgen Hinzpeter, simple journaliste et client de notre brave chauffeur de taxi, veut se rendre à Gwangju, ville gardée par les forces militaires, pour capter les images de la lutte d’un peuple en quête de démocratisation. C’est alors que Kim Sa-Bok, présenté comme naïf et quelque peu réactionnaire, conduit le reporter allemand au coeur de la ville, alors théâtre d’une véritable guerre civile. Avec le point de vue du « Taxi Driver » le spectateur découvre alors l’action et la dure réalité sud-coréenne. Pour peu qu’on en sache pas trop sur le scénario, on sera surpris par le passage d’un film au grand capital sympathie et au comique léger à un film poignant et dur. Les Coréens sont d’ailleurs très fort dans ce domaine, pour nous faire passer du rire aux larmes avec une facilité déconcertante.
Cette histoire inspirée de faits réels fait réfléchir d’autant plus que cette dernière est narrée avec une précision et une finesse millimétrée, même si on peut tout de même souligner les aspects un peu clichés comme la séquence où
tous les taxis viennent en aide à Kim et Jürgen sortant de nul part dans la forêt.
(9/10)