A tombeau ouvert, à tomber par terre
Martin Scorcese, ce nom renvoie immédiatement à des films comme Taxi Driver, Casino... On pense à des acteurs de la trempe de Di Caprio, De Niro... Pourtant, son putain de meilleur film est relégué dans les confins de nos mémoires. A tombeau ouvert, considéré souvent comme un film mineur dans l’œuvre du cinéaste, est de loin son film le plus poétique.
Dans les rues sombres et sales de Hell's kitchen, Franck Pierce déambule tel un damné. Hanté par les morts qu'il n'a put sauver. Au volant de son ambulance, la réalité lui échappe petit à petit. Alors que la sirène hurle, annonçant sa sale besogne, Franck va tenter d'exorciser ses démons.
Quand on pense « Nicolas Cage », c'est le mot « moumoute » qui nous vient à l'esprit. Hélas, certains films nous rappellent qu'il peut être un grand acteur. Dans la peau de Franck Pierce, héros misérable qui se noie dans l'alcool, notre acteur démontre l'étendue de son talent. Incarnant un psychotique qui tente désespérément de se raccrocher à la vie, alors que seule la mort l'entoure.
Le film est une chronique urbaine assez noire. Scorcese décrit une réalité où les plus démunis sont tués à petit feu par une société où seuls les plus riches peuvent se payer des soins. Ces laissés-pour-compte luttent ainsi pour leur survie. Franck Pierce, lui, se rêve comme un sauveur. Relevant ceux qui ont perdus la vie. Mais il réalise qu'il n'est que le témoin de la Mort. La rue n'est qu'un cimetière de plus.
Le héros devra parcourir un chemin de croix pour son propre salut. Essayant de sauver une femme, Franck va accepter son rôle dans cette ville. Il est le saint et le martyr à la fois, essayant d'extirper les âmes de ce tombeau à ciel ouvert.
Scorcese filme la mégalopole new-yorkaise tel son héros Franck. Donnant à la ville un aspect désespérée et folle. On se sent comme happé par la ville. La réalisation nous entraîne dans une aliénation, par ses effets de lumières kaléidoscopiques, d'images confuses des flux de circulation, un montage nerveux. Du Scorcese au top de sa forme
Le film multiplie les références bibliques. Entre une vierge prénommée Maria qui accouche (en fait une junkie totalement défoncée qui ne savait même pas qu'elle était enceinte), un ambulancier qui sort des versets de la Bible. On pourrait se poser des questions sur le fond du film. Mais le réalisateur, avec humour, met une certaine distance avec le christianisme. Loin d'être un film de propagande, Scorcese tente de nous montrer que la religion s'est fondue avec cette ville aliénée, devenant un exutoire pour quelques personnes.
Un film sombre et émouvant qui tente de dépasser sa condition au travers d'un humour noir. Apporté par des personnages secondaires aussi allumés les uns que les autres, tel cet ambulancier Marcus qui récite un prêche à chacune de ses interventions, où le médecin qui engueule ses malades, ou enfin Tom, cet autre ambulancier qui frappe les blessés tel un chevalier de l'Apocalypse. Leurs performances sont hallucinantes et ajoutent un brin de sourire.
Que dire de ce film ? Scorcese retrouve ses obsessions pour peindre l'homme à vif. Telle une chronique d'une poésie noire. C'est beau hein ? Pour moi, ça vaut presque Taxi Driver, point barre.
Une critique par tsointsoin du blog format 35
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