Il y a dans A Touche of Zen l'impression d'assister à la parfaite communion entre la nature et le cinéma, la sensation de se retrouver au sein même de celle-ci et d'y être en harmonie, tout comme le fait de se sentir au côté des personnages.
Mis en scène en 1971 par King Hu, A Touch of Zen nous envoie dans la Chine septentrionale pour y suivre trois fugitifs qui vont devoir résister à de puissants ennemis. La force du film ne se trouve pas forcément dans l'histoire, qui reste tout de même bien intéressante, mais dans l'atmosphère, tout le long puissante, flirtant parfois avec le fantastique et régulièrement immersive, procurant la sensation de se trouver aux côtés des personnages, qui évitent d'ailleurs tout manichéisme comme en témoigne le remarquable final, et de vivre leurs aventures.
C'est d'ailleurs là aussi un des points forts du film, à savoir les protagonistes qui sont intéressants et surtout attachants et assez profonds, King Hu démontrant une vraie qualité d'écriture. C'est surtout à travers le personnage féminin que la richesse et les émotions vont peu à peu s'intensifier. Les méchants sont eux aussi magnifiés par sa caméra, arrivant à véhiculer une vraie crainte et dont les apparitions sont parfaitement dosées. L'amour, la chevalerie, le courage, l'insoumission ou encore l'éducation, ce sont de nombreuses thématiques qu'il arrive à inclure dans son oeuvre mais toujours avec une certaine finesse et un savoir-faire indéniable, il mêle tout ça avec autant de talent à la réalisation qu'à l'écriture.
Derrière la caméra il se montre régulièrement brillant, que ce soit pour les combats mais surtout pour la façon de gérer l'espace, le temps, le rythme mais aussi l'alchimie avec les éléments naturels. Effectivement, on ressent le souffle du vent, les feuilles qui tombent ou encore l'ombre des arbres et la noirceur de la forêt, devenant un personnage fantastique à part entière et accentuant l'ambiance parfois angoissante. Les tableaux proposées sont souvent magnifiques, que King Hu sublime grâce à son travail technique et le montage.
Malgré quelques soupçons de romanesque ou encore d'aventure, A Touch of Zen n'en oublie pas des zestes d'humours, plutôt bien dosés et bien insérés au récit. La lenteur du récit, surtout dans la première partie, est tout aussi bien maîtrisée tant King Hu arrive à instaurer assez vite une véritable ambiance et un certain lyrisme tout en nous passionnant pour les personnages et enjeux. Le casting est à la hauteur, notamment la jolie Xu Feng, tout comme la reconstitution qui ne manque pas d'être sublimée à chaque mètre de pellicule.
King Hu signe avec A Touch of Zen une oeuvre d'une rare puissance où l'on se sent en parfaite alchimie avec la nature, devenant un personnage à part entière et participant aux nombreuses sensations et émotions que l'oeuvre véhicule.