Une jolie pauvresse campagnarde est séduite,engrossée et abandonnée par un vil séducteur.A la suite de quoi sa mère meurt,son père c'était déjà fait,puis c'est au tour du bébé de succomber peu après l'accouchement.Elle finit par trouver un emploi de servante chez de riches fermiers et le fils de la maison,un très gentil garçon,tombe amoureux d'elle.Mais son passé va la rattraper.On reconnait là une trame de mélo ultra-classique,assez proche de "Tess d'Urberville",le roman de Thomas Hardy,dont Polanski a tiré un film magnifique.Cette accumulation de malheurs frappant une pauvre fille pourrait être pénible à regarder mais Griffith,un des géants des origines du cinéma,la met magistralement en images.Sa mise en scène,d'une grande modernité,est fluide,précise et dynamique,assurant une narration bien rythmée et d'une clarté limpide.Il utilise formidablement les décors naturels champêtres,la présence des animaux, et son style naturaliste fait merveille,notamment lors de la bluffante scène de la rivière dégelée.Sur le fond,il parvient à alléger une histoire plombante en multipliant les personnages pittoresques et les pistes scénaristiques,s'appuyant sur un montage parallèle qui est un modèle du genre.En outre,il développe une critique sociale d'une virulence inusitée pour l'époque.Les conventions religieuses et sociales,le sexisme,la malveillance et l'hypocrisie de la haute société et les inégalités économiques sont violemment dénoncés.Les acteurs sont très bons,en particulier Richard Barthelmess,le prototype du mec bien,et Lowell Sherman,le jouisseur sans scrupule.Hélas Lillian Gish,l'héroïne malmenée,est nettement moins convaincante et gâche un peu le film.L'actrice fétiche de Griffith,mégastar du muet,en fait des caisses,soulignant exagérément chaque effet et livrant une performance ridicule.