Acide aimerait représenter, par la désintégration des corps, la désintégration de la cellule familiale fragilisée de prime abord par la violence du père, la séparation des parents et l’isolement de la fille ; et tirer de celle-ci une réflexion sur la nécessité de vivre avec les erreurs commises par nos aînés, voire de chercher à y remédier. Le parcours de Selma, âgée de quinze ans, passe ainsi du repli initial sur soi à l’altruisme, jalonné en cela de rencontres avec des enfants puis des adultes qu’il faut aider. Malheureusement, le long métrage applique à sa focalisation restreinte, composée d’une succession de huis clos mettant en scène un nombre restreint de personnages, une imagerie du blockbuster catastrophe, empruntant jusqu’au plagiat des séquences à War of the Worlds (Steven Spielberg, 2005), notamment celle de l’attroupement autour du pont, à The Happening (M. Night Shyamalan, 2008) et à Dante’s Peak (Roger Donaldson, 1997) avec cette marche dans la boue acide rappelant le supplice du chemin de lave. Aussi le paysage n’est-il pas assez sondé – à quoi bon ancrer le récit dans l’espace arrageois puis belge si la caméra ne s’intéresse pas à ses spécificités ? –, et pour combler ce déficit environnemental vient la musique vrombissante de Rob. Quant à la direction d’acteurs, elle oscille entre le stéréotype et l’agacement : l’adolescente en crise insupporte, son évolution intérieure ne transparaît jamais à l’image puisque le réalisateur, lorsqu’il s’agit de montrer le lien social et la naissance du care, préfère accélérer le rythme et simuler l’urgence.
En résulte un long métrage lui-même désintégré, complaisant dans les malheurs convoqués et approximatif dans ses enjeux politiques, en témoigne l’expérience réalisée sur le chat qu’un cinéaste véritable aurait traitée par baquet d’eau interposé, et non en ressort horrifique des plus abjects. Just Philippot délaisse son spectateur, oubliant que le cinéma, en choisissant de montrer, de suggérer ou d’éluder, accorde une place essentielle à l’imagination de celui-ci et le rend, paradoxalement, acteur à part entière. Quelques scènes efficaces retiendront, un temps, notre attention.