Adieu Berthe - L'enterrement de mémé par Chro
Par Vincent Garreau
Après le grand carrousel de Bancs publics (Versailles rive droite), qui semblait lancer le cinéma de Podalydès sur l'orbite incertaine de la caméra centrifuge, du gag à sauts de puce, Adieu Berthe marque une pause et s'interroge, fait le point. D'abord en renouant avec la simplicité de style des aventures d'Albert Jeanjean, avec le charme lunaire de la série versaillaise (dont il semble livrer ici la vraie suite, celle à laquelle tous les fans avaient rêvé à l'annonce de Bancs publics, qui devait la conclure). Ensuite en plongeant le héros podalydésien, nommé ici Armand et toujours génialement incarné par Denis, dans les affres de la cinquantaine, compliquant ses dilemmes coutumiers de questions plus larges, et plus graves : la mort, la perte, le sens de la vie. Pharmacien passionné par la magie, Armand ne parvient pas à se décider entre sa femme et son amante. Un beau jour, sa mémé Berthe, dont il savait très peu de choses, décède, et toutes sortes de questions surgissent : faut-il incinérer, enterrer ? Qui était Berthe ? Comment est-elle morte ?
« Pouf, pif, crac, pschitt », c'est comme ça qu'elle est morte Mémé, personne ne sait le dire autrement. Mémé qui meurt, c'est le grand gag du film, c'est une chose qui était là et qui n'est plus là, c'est insensé et c'est absurde, ça peut tomber sur n'importe qui. Ça semble dire que le non-sens (emblématisé, de film en film, par la glaviole, ce machin en fer dans lequel on trébuche sans jamais tomber - pas de chute à la blague) dissimule chez Podalydès une vraie philosophie d'angoisse. Un cercueil en forme de monolithe kubrickien, un écran de veille où défile le vide interstellaire et devant lequel Armand reste comme hypnotisé, sont les premiers signes discrets d'un malaise existentiel d'une ampleur inédite chez lui. Podalydès est un cinéaste pascalien, pas seulement tourmenté par le doute, mais aussi passionné des structures défaites, fragmentaires (voir dans chaque film ce goût du sketch, des chapitres clos), des écarts d'échelle (voir le court Minirama, les vues ras du plancher du Mystère de la chambre jaune, les objets aux tailles démesurées de Bancs publics, etc.). (...)
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