C'est tout simplement immense. Déjà, parce que c'est un grand film politique sur la situation française des années 60, avec l'ORTF, le service militaire et la crainte du contingent en Algérie, et surtout, prévoir l'ascension fulgurante de la Chine et le rapprochement en conséquence des Deux Grands. Mais Adieu Philippine, c'est aussi un film vibrant de vie, un remède contre la morosité sorti quatre ans avant les Demoiselles de Rochefort de Demy. C'est aussi l'un des plus beaux duos du cinéma, dont je suis tombé éperdument amoureux, le tandem Liliane-Juliette qui est absolument splendide et d'une grâce infinie. A partir de là, on ne peut que reprendre les mots de Jean-Luc Godard : "Quiconque n'aura pas vu Yveline Céry danser un cha-cha-cha les yeux dans la caméra ne pourra plus se permettre de parler cinéma sur la croisette". Le cha-cha-cha qui berce tout le film, le montage inventif, et tout simplement le bonheur de Rozier de filmer, font de ce film un grand représentant de la Nouvelle Vague, avec sa fougue, sa sensualité insoupçonnée et son insolence, et surtout un grand pas cinématographique. Somptueux, enivrant, le petit frère spirituel de Godard, et il me tarde de découvrir le reste du cinéaste.