L'art de la vitalité
Cinq ans après Mon Roi, Maïwenn retrouve le chemin de la réalisation avec ADN. Un drame intimiste, sobre et très personnel, qui questionne le deuil et la quête des origines dans la France...
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le 21 sept. 2020
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Des mots de la réalisatrice, le film comprend des éléments autobiographiques sans être autobiographique. Cet "avertissement" n'était pas tant pour empêcher toute spéculation sur sa vie personnelle que pour dire "j'ai mis du Moi dans cet oeuvre". Et effectivement le "Je" est partout dans une oeuvre artistique, non pas que nous pouvons déduire des éléments biographiques à partir du matériel, mais l'auteur nous livre toujours une certaine sensibilité et finalement une "vision" particulière du monde. Selon cette "règle du je", la rencontre entre une oeuvre et le public peut crée un étonnement artistique et une émotion singulière. C'est ce fameux Beau composé d'un je-ne-sais-quoi.
Maïwenn nous livre donc son "bébé" qui se réclame de l'intimisme d'une famille large autour d'un décès. Un équilibre difficile donc qui révèle des choses très (trop) connues. Quand bien même je ne connais pas son oeuvre, j'y reconnais des formes et des mots assez utilisées. Sur ces deux points (la mise en scène et les dialogue), le film échoue à créer en moi quelque chose d'unique. Il ne restait en moi que quelque chose de désagréable. Il n'y a rien de plus affreux qu'un film remplie de bons sentiments qui se contemple lui-même.
Les premiers plans donnent le ton : trop rapides pour installer une ambiance, trop clichés pour faire vivant. Et donc j'ai eu cette sensation d'entre-deux pendant quasiment tout le film. A la fois je trouvais le rythme extrêmement mou et à la fois je voyais des choses arrivées trop vite. Le décès du grand-père motive l'héroïne (interprétée par Maiwenn) a vouloir renouer avec ses origines. Cet élément, malgré son caractère tragique évident, ne crée pas grand chose sinon des gros plans sur les gens qui pleurent ou sur la photo du grand père. C'est juste une balise, reconnaissables parmi tant d'autres. On a vu plus subtil. Mais surtout, cela ne fonctionne pas puisque d'une part on a pas vu la rupture entre Maiwenn et ses origines, puis la relation grand père - petite fille n'est pas assez développée d'autre part. Elle n'est pas non plus évoquée puisqu'on nous montre des éléments très artificiels : réunion de famille filmée en gros plan avec de la musique lourdingue avec un livre sur le papi.
Tout est beaucoup trop attendu et convenu pour avoir le moindre intérêt. Toute potentialité artistique est décidément entravée par cette démarche de vouloir faire trop vraie. Mais on ne crée rien de vrai avec des éléments aussi superficiels et creux. Si quelques remarques drôles de Louis Garrell fonctionnent, je ne voyais que des acteurs jouer la comédie de Maïwenn. L'éclatement entre les différents membres de la famille aurait pu être bien exploitée si la mise en scène soulignait quelque chose mais non tout repose sur des dialogues pas grandioses non plus. Je le dis et je le redis enfin les choix de cadrage et de montages n'ont vraiment rien de singuliers. On filme ce qu'on doit filmer, il n'y a pas de rupture de ton ou d'évolution identifiable (par le langage cinématographique) : la scène au ralenti de la balade en vélo sur les quais parisiens avec de la musique... Super.
La dernière scène aurait pu m'achever par sa candeur (et je faisais déjà que de bouger sur mon siège) mais comme elle est assez différente (mais dans le même ton niais), elle devient assez plaisante à voir (même si la qualité d'image est pourrie).
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le 19 oct. 2020
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