Poil à gratter
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A l'origine, Ettore Scola souhaitait réaliser un documentaire sur les habitants de ces bidonvilles en surplomb de la capitale italienne. Mais le scénariste de formation a finalement choisi le registre de la fiction pour évoquer cette population démunie et totalement marginale, en pleine période d'explosion de la société de consommation. Reste toutefois de l'intention documentaire initiale un film très descriptif, où le scénario s'avère plutôt minimaliste.
Autour d'un Nino Manfredi grimé et vieilli, la distribution est composée de comédiens de théâtre peu connus et de véritables habitants de ces borgata, qui confèrent au film une part d'authenticité supplémentaire.
Manfredi interprète Jacinto, l'odieux patriarche d'une famille nombreuse et désunie, qui s'entasse dans une baraque en tôle insalubre, dans la promiscuité la plus écoeurante. Chacun survit comme il peut d'expédients divers : vols, prostitution, pension de retraite de la grand-mère (incarnée par l'inénarrable Giovanni Rovini)...
Ettore Scola va très loin dans sa représentation de la pauvreté, adoucissant à peine son récit par le recours au burlesque (la grand-mère jouée par un homme) et au slapstick : la violence frontale est ainsi quelque peu mise à distance, à base de coups de pied aux fesses et bagarres de chiffonniers très théâtralisées.
Cela n'empêche pas de montrer les pauvres comme des êtres abjects et quasiment inhumains, comme pour prouver qu'il n'est nul besoin d'être riche pour se comporter en crapule égoïste.
Cette évidence passe pourtant très mal en 1976, dans une Italie partagée entre le pouvoir de centre-droit à dominante catholique et l'opposition de gauche : aucun de ces deux camps ne souhaite assumer une telle représentation de la pauvreté, et le film est très mal reçu, en dépit de son Prix de la mise en scène à Cannes.
Même si l'ironie d'Ettore Scola est souvent perceptible (notamment à travers la bande originale d'Armando Trovajoli), "Affreux, sales et méchants" reste une œuvre sombre et désespérée, à l'image de certains passages très durs, comme le regard de ces enfants derrières les barreaux de leur nurserie de fortune...
Comme pour entériner définitivement le pessimisme de son propos, Scola achève son film par une séquence dénuée de tout espoir : la jeune fille qui semblait la moins "atteinte" de la colonie se prépare à perpétuer ce cycle sans fin, puisqu'elle apparaît enceinte lors de l'ultime plan...
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Créée
le 21 mai 2016
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