Ah Londres, quand ton petit coeur fait boum !

Mini-rétrospective Hitchcock et donc mini chros suite et fin !
(Je mettrais un récapitulatif de toutes les mini chros à la fin de celle, plus grande, que je prépare sur Fenêtre sur cour pour les curieux, sait-on jamais)


Dans les années 30, en pleine période anglaise, Hitchcock a commencé lentement à entamer sa vitesse de croisière et les germes de films matriciels ainsi que les (déjà) grands films se bousculent. Adapté d'un roman de Joseph Conrad dont il reprenait sans savoir alors le titre original (« Agent secret ») à sa précédente œuvre (appelée chez nous « Quatre de l'espionnage »), Sabotage est un film intéressant et curieux un brin torpillé par un rythme pas toujours adéquat malgré son potentiel des plus positifs.


L'ouverture du film est significatrice du savoir-faire du Hitch d'emblée : En moins de 10mn on a non seulement la définition textuelle d'un sabotage mais aussi l'activité en direct (laquelle plonge dans le noir quasiment tout Londres) ainsi qu'une tentative rationnelle vis à vis du « héros » qui explique ça à une foule passablement surprise sans oublier enfin qu'on a vu le visage du méchant, donc l'intrigue se focalisera directement sur autre chose que de chercher à savoir qui est le coupable (ici, comment le démasquer).


Comme bon nombre de films du réalisateur pendant ces années 30/40 c'est un nouveau thriller coulé dans l'observation quasi sociologique de cette société anglaise inquiète qui s'agite (1) et voit monter la guerre lentement parallèlement à la montée en force d'un certain parti national socialiste allemand. Et si comparé à d'autres films à venir le méchant n'est pas directement nommé en tant que nazi, il n'en demeure pas moins un personnage avec un nom à consonance plus ou moins germanique, sorte d'agent plus ou moins infiltré dans le pays avec comme couverture une jeune femme et son môme turbulent et maladroit, eux purement british. Un méchant froidement égoïste, cynique et calculateur qui se cache derrière de vagues remords de ne pas prendre de vies par ses actes mais qui ne sera pas plus ébranlé que ça quand une catastrophe inévitable arrivera. Bon point pour le réal qui nous a toujours gratifié de salauds « qui en avaient », on y échappe pas ici, bien, bien.


Intéressant aussi de voir qu'en 1936, Hitch a gardé, ou plutôt inclus le langage du muet dans son cinéma, se servant des gros plans des premiers temps du cinéma pour mieux figurer la psychologie humaine en direct avec ses tréfonds insondables. Un Bergman retiendra admirablement la leçon dans les années à venir afin d'en faire une composante directe de son cinéma là où le maître du suspense utilisera par la suite plus ledit gros-plan afin d'en faire son « MacGuffin » (2).


Bref tout est réuni pour nous faire un grand film sauf que le réalisateur curieusement plombera le rythme de son film à certains moments, tel cette scène de livraison de colis au suspense mal géré et ponctué d'une séquence qui se veut drôle et comique en pleine brocante (avec un espèce de vendeur-charlatan en tous produits hygiéniques) alors que non.


Pourtant on ne sera pas trop dur avec ce film où non seulement Hitch ose et réussit quelques séquences choc pour l'époque tout en dépeignant de bout en bout un film qui vire à la noirceur la plus totale. Les dernières secondes de « happy end » terriblement ambigu peuvent ainsi se voir comme une concession tant au distributeur et studio qu'au public mais le mal est fait et l'on reste avec une sacré amertume en travers de la gorge. Donc quelque part même si le film est bancal, le réalisateur a en soi déjà pas mal remporté son pari sur plusieurs plans...


========


(1) Parfaitement retranscrit en cela par la présence de ce cinéma où les gens peuvent se rassurer, ou bien les privations à venir de la guerre et des foyers plus pauvres déjà perçues ici dans la scène du steak au restaurant.
(2) Je ne vous apprends rien ami cinéphiles : https://fr.wikipedia.org/wiki/MacGuffin

Nio_Lynes
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le 25 mai 2020

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Nio_Lynes

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