On pense beaucoup à Bresson en voyant Al Haffar. En plus sophistiqué peut-être (il y a quelques effets visuels qui tiennent de l'art vidéo), mais ça revient au même. Un homme garde un lieu vide. Il tourne autour de symboles. Il creuse des trous. Il fait demi-tour. Une ombre passe. Un chameau tremble. On voit la ville qui gondole au loin. En très peu de plans s'articule tout un monde.
C'est très émouvant, en fait, parce que c'est totalement universel, tout en étant documenté : l'homme en question surveille une nécropole dont le contenu a été transféré dans un musée des Emirats Arabes Unis. Ce qui se joue ici, c'est donc la façon dont on peut s'approprier un signifiant sans signifié, une forme vide, un espace inutile. Comment on fait avec l'inutile ? Et tous les fantômes qu'on côtoie, dans ces non-lieux. Toutes les présences, toutes les absences.