Je continue de regarder les films recommandés sur le forum IMDb à la suite de mon visionnage de Roger Dodger ; le Alfie de 1966 ne me tentait pas tellement, en fait je voulais plutôt voir le remake, mais… je me suis forcé à voir l’original avant, juste pour faire les choses dans l’ordre et pouvoir comparer.
En fait je craignais vraiment que le film avec Michael Caine souffre du sexisme de son époque, tout bêtement parce j’avais le mauvais souvenir d’un autre classique avec le même acteur, Get Carter, où la misogynie était vraiment insupportable.
Pourtant, ce n’est pas le même genre de film, ce n’est pas le même réalisateur ni le même scénariste… mais j’avais plus ou moins raison.
Je craignais également que la représentation d’un dragueur dans les années 60 soit trop désuète. Bon, déjà c’est Michael Caine… peut-être qu’il correspondait aux canons de beauté à l’époque, mais aujourd’hui pas tellement (je constate que certains lui trouve du charme, moi non). Certes, ce n’est pas la faute du film, même s’il en souffre quand même.
Et puis, comme tous les autres personnages, le héros a ce fort accent anglais, qui des fois peut s’avérer sexy… mais ici, loin de là.
J’ai bien aimé au moins l’aspect un peu didactique des explications d’Alfie sur ses relations multiples et les astuces sur ce qu’il faut faire ou non ; la façon dont il en parle avec un détachement pragmatique et honnêteté me plaisait, et il faut avouer que c’est plutôt surprenant pour un film de cette époque.
Par contre, j’ai vite détesté le dédain avec lequel le héros traite toutes ses copines.
"Une fille doit connaître sa place" : lui peut aller voir ailleurs, mais elles non. Ce sont ses choses, il ne les désigne même pas par le pronom "she" mais "it".
Il y en a une qu’il traite particulièrement comme de la merde, elle fait tout pour lui, mais plus elle est à ses pieds, plus Alfie est odieux. Et en plus, il l’a mise en cloque, mais s’en fout complètement.
A partir de là, tout le film durant, le personnage principal se comporte en immonde connard, qui ne pense qu’à ses propres intérêts. Il n’a de respect pour rien ni personne, pas même ses camarades, à qui il vole leurs épouses ou leurs conquêtes.
Quand sa copine pleure sur son épaule parce qu’Alfie ne veut pas de son enfant, il lui demande juste de faire gaffe à ne pas mouiller sa chemise.
C’est même pas drôle, c’est juste insupportable.
Et puis Alfie n’est pas un connard que dans un seul domaine, on apprend qu’il incite sa copine à voler, et que lui-même pioche chez ses employeurs.
A celle qu’il a mise enceinte, le héros interdit de voir une loque humaine qui en pince pour elle. Et cette dernière ne décide de se marier avec lui que lorsqu’elle a besoin de quelqu’un pour élever son bébé.
Comme ça, on a d’un côté un pur connard, et de l’autre des losers pathétiques. Les personnages sont tous énervants d’une façon ou d’une autre, et je n’ai pris pratiquement aucun plaisir à suivre leurs histoires.
Le pire c’est qu’on dirait qu’on doit avoir de la compassion pour eux, au vu de l’usage de la musique mélodramatique ou de ces moments de réflexion silencieuse.
Il y a quelques scènes qui font ressortir une once d’humanité d’Alfie, mais ça pèse bien peu dans la balance par rapport au reste.
A la limite, j’ai été amusé par des petits gags par rapport à la narration face caméra, qui est affectée par ce qui se passe autour du héros (ça n’est pas comme la plupart des films, où le temps est comme arrêté pendant qu’un personnage brise ainsi le 4ème mur). Et il y a une scène très drôle de séance photo où Alfie, avec un culot admirable, drague une femme tout en prenant le fric de son compagnon. Dommage qu’il n’y ait pas plus de scènes comme ça.
Mais de toute façon, la plupart des astuces du héros pour séduire mènent à l’obtention d’une nouvelle femme de qui abuser ou d’une nouvelle esclave. Le film en redevient insupportable.
Presque tous les personnages féminins sont aisément manipulables, sans aucune volonté ni contenance.
Et ça dure près de 2h comme ça. Alors certes Alfie se retrouve finalement pris à son propre piège, mais son "châtiment" est bien faible par rapport à tout ce qu’il a fait subir…
Pour une fois, j'aurais préféré que le méchant ait ce qu'il mérite.