La sortie de Prometheus et d'Alien : Covenant avait suscité une levée de boucliers chez un certain segment du public que l'on baptise habituellement du nom de "fans", frustrés de ne pouvoir visionner une énième mise en scène de leurs créatures favorites. Les voilà enfin satisfaits ! Tous les éléments constitutifs d'un Alien "classique" sont enfin réunis, dont la formule pourra être variée à l'infini dans les années et décennies à venir. Disney dispose d'ailleurs d'un certain savoir-faire dans le recyclage de "franchises", avec une inventivité relevant du générateur de scénario.
Chacun a ainsi félicité, à juste titre, le réalisateur Fede Alvarez, dont il faut reconnaître la maîtrise parfaite, maîtrise purement technique - et même artistique, pourquoi pas. Le "produit" obtenu est irréprochable : l'intrigue, les personnages, les monstres, le décor, tout cela s'articule somptueusement (bravo !). Le cinéma actuel semble être devenu une affaire de technique, au fond. Même si l'histoire ne présente aucun intérêt, il nous reste la fameuse "photographie", les effets spéciaux, et les décors numériques, tout ce que l'on peut obtenir avec 80 millions de dollars, soit la moitié du coût de production d'un F35. La même remarque vaut pour à peu près tous les grands films de SF qui sortent depuis quelques années.
Cependant, il se peut que pour un autre segment du public, les effets spéciaux, la photographie, etc., ne suffisent pas à combler un éventuel besoin d'évasion. C'est ici qu'entre en action : l'appréciation de l'histoire. Or l'histoire narrée par Alien : Romulus est difficile à prendre au sérieux. D'abord, ce nouvel opus vient - inutilement - compliquer un peu plus une saga devenue déjà bien confuse, en particulier depuis les deux derniers épisodes. Mais surtout, l'entrée en matière fourmille d'absurdités.
Pour en citer trois :
1. On se demande pourquoi la "compagnie" cherche à récupérer un "alien" perdu dans l'espace - Aliens nous apprenait pourtant que ce genre de manœuvre avait une chance de réussite "sur des millions" - alors que le fameux vaisseau extraterrestre gisant sur LV-426 regorge d'œufs exploitables.
2. Il est difficile d'adhérer à la galerie de portraits des "adolescents" en quête d'aventures - bien conforme à tous les films du genre - misérablement exploités par la "compagnie", orphelins de parents eux-mêmes exploités et morts à la mine comme dans Germinal, mais qui semblent tout droit sortis d'une sitcom ou d'une série Netflix, dans une perspective misérabiliste façon Disney - cette peinture de la misère sociale de l'espace aurait peut-être gagné à être un peu mieux travaillée.
3. On ne comprend pas comment cette bande d'ados exploités par un monde totalitaire parvient à s'emparer aussi facilement d'un vaisseau spatial et à s'envoler, le manœuvrant comme de vrais moussaillons aguerris.
Une fois cette intrigue peu crédible plantée, la suite se déroule sans trop d'anicroches, dans une série d'actions prévisibles, toutefois un peu confuses en seconde partie, truffée de références aux autres opus de la série. L'apparition prématurée d'un "parasitoïde" sur un écran, lors de l'entrée dans le laboratoire, vient d'ailleurs détruire tout effet de surprise (il semblerait que Fede Alvarez déteste surprendre son public). Et tout ceci se termine par un quasi plagiat d'Alien : la résurrection.
En résumé, Disney nous a pondu un film d'hommage, au scénario banal, qui se laisse regarder avec indifférence et sans déplaisir, recyclant toutes les vieilles ficelles de la saga, pour la plus grande satisfaction de ceux qui souhaitaient revoir des xénomorphes se dégourdir les pattes dans les recoins d'un vaste navire de l'espace en quête de chair fraîche. Objectif atteint.