Très impressionné par ce dessin animé qui vous surprend d'abord par la qualité de ses images pour ensuite vous émouvoir par la force de son scénario.Chapeau... Je précise que j'ignorais l'existence du manga qui a inspiré le film. Les quelques images que j'avais entrevues du film me rappelaient plutôt Beavis and Butthead :-)
Si le réalisateur est américain, le dessin, très japonais lui, est bluffant, la laideur des personnages ne retirant rien à leur psychologie et on s'y fait très vite. La néo-Tokyo proposée ici est extraordinaire visuellement, vous surchargeant la rétine par ses références foutraques à la culture américaine et aux cultes orientaux (très belle scène avec Ganesh). La ville ressemble à un gâteau coloré...
L'intrigue est troublante, centrée qu'elle est sur une paire d'orphelins qui se la jouent vigilante en culottes courtes et le font avec une violence certaine..Le plus grand des deux (Black) se sent responsable de son partenaire plus jeune (White) (enfin plus jeune, surtout plus immature) et le protège tout en l’entraînant bêtement vers de multiples périls.... j'ai bien aimé cette vision " enfants des rues" ainsi que leur quête donquichottesque. Bon, qui dit Japon dit Yakuza et bien sûr ceux-ci vont venir gâcher la fête... L'histoire est assez complexe, mélangeant racket des yakuzas, intervention " sociale" de flics au grand cœur, et existence d'un boss qui manipule des clones de guerre inquiétants et semble en vouloir à nos gamins... Ca castagne pas mal, il est question de trahison, de responsabilité, de magouilles immobilières et de paternité...
Ce qui marque vraiment c'est la relation entre Black et White, les deux faces d'une même personne sans doute, et surtout la personnalité limite de White, petit être extraverti et névrosé qui vit beaucoup dans sa tête (belles séquences de rêves) et semble pourtant assurer la santé mentale de Black ("j'ai toutes les vis qui lui manquent", dit-il). C'est beau et assez touchant...
Tout n'est pas parfait, la fin du film propose un personnage fantasmatique inédit qui fait tâche dans le scénario, et, chose qui m'agace intensément, on essaie de nous tirer une larme pour des yakuzas en partance... Désolé mais je n'ai aucune sympathie pour des type qui arrachent l'oreille des gens, même si plus tard ils deviennent papa ou fument comme Humphrey Bogart....
Un peu décontenancé personnellement par le final du film, mais l'expérience psychédélique, la beauté des images, les émotions contradictoires que suscitent ces gamins font de "Amer béton" un film surprenant et accrocheur. je recommande sans hésiter !