Attention, informations en approche pouvant dévoiler l'intrigue du film.


La transformation de Lester (Kevin Spacey) est totale pendant cette année. On assiste à la reconquête de tout ce qu’il avait abandonné : son corps, son autorité, sa liberté de choix (avec notamment la scène de la « musique d’ascenseur »). Il se donne un objectif, comme objet de ses fantasmes, la meilleure amie de sa fille, Angela. D’autres arcs coexistent dans l’histoire : sa fille tombe amoureuse du jeune voisin, Ricky, passionné par la beauté dans toutes ses formes ; sa femme, Carolyn, est obnubilée par un agent immobilier réussissant mieux qu’elle ; la relation père-fils dans la maison voisine ; la vie sexuelle (ou pas) d’Angela. Toutes ces histoires mènent à l’incroyable tension du dernier acte, dénouement inattendu où chaque personnage est dépouillé jusqu’à révéler sa vraie nature. Angela redevient une gamine affolée, Carolyn fait tout pour se créer une confiance en elle qu’elle n’a pas, le père de Ricky refoule et supprime ses problèmes, …


L’esthétique du film repose principalement sur le travail de Ricky. La scène du sac plastique virevoltant dans les feuilles mortes m’a particulièrement marqué : « That's the day I realized that there was this entire life behind things, and this incredibly benevolent force that wanted me to know there was no reason to be afraid, ever. [...] Sometimes there's so much beauty in the world, I feel like I can't take it, and my heart is just going to cave in ». Cette beauté se retrouve dans les contrastes : le sac en plastique blanc sur les feuilles d’automne, ou le rouge écarlate qui domine les hallucinations presque oniriques de Lester, des pétales de rose jusqu’au rouge sang.


Chaque personnage est travaillé, en n’étant pas réduit à un seul trait de caractère. Le père du voisin par exemple, n’est pas seulement militaire et homophobe : l’éducation qu’il a donnée à son fils (adoptif ?) ainsi que son homosexualité refoulée sont aussi abordées (l’histoire de sa femme est aussi développée mais la scène a été coupée). Plus encore, chaque personnage a un lien particulier (plus ou moins éloigné, etc…) avec chaque autre, et donc se comporte différemment dans chaque interaction. Lester interagit avec chacun des personnages séparément, qui l'aident petit à petit dans sa reconquête. Cela peut paraître simple mais c’est souvent la critique que l’on peut faire à beaucoup de films où les rapports humains paraissent plats et creux, à force de personnages ayant des réactions stéréotypées et standardisées quels que soient leurs interlocuteurs. Un exemple parfait en est les mauvais films de super-héros, ou encore la série Arrow.


En somme, chaque personnage cherche à exister et à compter, suivant ses propres standards : Ricky comme un reporter de la beauté, Angela par la sexualité qu’elle fantasme, Carolyn par la réussite sociale, Lester comme maître de sa propre vie … Et c’est cette quête d’importance qui donne corps aux interactions de ce film, et qui lui donne sa beauté, également. C’est Lester, qui, après avoir triomphé de son image d’homme insipide, étonne le spectateur en ne cédant pas à son désir. Il s’intéresse maintenant à ce qui se cache sous les apparences de ses proches, en étant visiblement heureux de savoir sa fille amoureuse. Le « How are you ? » d’Angela le désarçonne puis lui permet de répondre « I’m great », résumant parfaitement le chemin parcouru pour lui.

paul274
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le 18 déc. 2017

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