On ne va pas reprendre les éloges sur le potentiel énorme d’une idée de légaliser le crime durant une nuit aux USA, il y a tellement de bonnes idées sociales qui en découleraient qu’on valide direct n’importe quel projet allant dans ce sens. Ici, la multiplicité des personnages principaux, ainsi que le cadre urbain de la purge nous promettaient un survival riche en rebondissements, tout en se frottant à des sujets sociaux. Encore aurait-il fallu que le scénariste s’y attaque avec subtilité. Car c’est bien là que le bas blesse. L’introduction, meilleur passage du film de très loin (personnages plutôt bien introduits, différentes menaces potentielles qui se profilent avec des figurants patibulaires encore tenus par les laisses de la loi en attendant que commence la nuit de purge), a le don de planter des thématiques fortes (lutte des classes, enjeux politiques derrière la purge, détails qui la rendent crédibles (banques vidées, barricades plus ou moins efficaces, et ses étranges ballets de camions chargés de militaires surprotégés s’attaquant à des immeubles entiers), en bref tout ce qu’il fallait pour faire décoller le film et l’élever à un rang de brûlot politique, malgré sa ratification -12 ans (autant dire que le gore du premier épisode est considérablement affadi). Mais comment retenir sa rage de voir tout ce potentiel gâché par un film qui finit par s’embrigader dans un des aspects les plus caricaturaux de la situation créée par la purge, et surtout, pour notre plus grand malheur, d’en prendre un parti démagogique au possible. Peu à peu, malgré les multiples digressions à base de suspense et d’action, le chemin qui se trace est aussi clair qu’atterrant : la purge, c’est le moyen pour les riches de tuer les pauvres. A croire que le 1% n’ait pas déjà assez de phagocyter les richesses du monde qu’ils doivent en plus soulager leur psychopathie latente (l’argent corrompt et vous transforme en requin sanguinaire) en trucidant des pauvres (pour de l’argent, du coup). Oh, certes, il y a quelques petits personnages qui montrent les tiraillements intérieurs dans les classes (le voisin lubrique, les petits gangs rabattant le gibier pour le livrer sur un plateau d’argent aux richards), mais c’est bien à cette réduction des enjeux que le film se livre. Alors, logiquement, il se range du côté des pauvres, sous le commandement d'un noir à lunettes hargneux comme il faut (quoiqu'il cerne au final les justes enjeux de la purge, et que sa contre réponse paraît finalement appropriée dans le chaos général). Malheureusement, plusieurs grosses lacunes ou caricatures accumulées rendent la conclusion très laborieuse, rabaissant les ambitions à un duel aux ambitions rejoignant finalement Elysium, dont l'aboutissement consiste à balancer la révélation du film sans l'avoir approfondie à minima. On voit la logique, mais question polémique, la caricature faite des riches ne passe tout simplement pas. L’épilogue a beau essayer de relancer un message social fédérateur au premier degré (qui peut donc facilement passer pour un cliché agaçant), la dernière révélation qu’elle nous fait explose à nouveau les quotas de gâchis à force de simplification, à savoir que c’est le gouvernement qui purge les indésirables, essentiellement dans les logements sociaux, histoire de maintenir les quotas. C'est dans la logique, mais asséné sans le moindre développement et justification. Si le film faisait le moindre effort pour rendre ses idées crédibles (en prenant ces éliminations visées sur des critères de dépendance aux allocations, sur les hôpitaux… là, on aurait des éléments terrifiants retournant la bureaucratie contre ses usagers (un sujet excellent pouvant parler du patriot act de façon déguisée), on pourrait adhérer à une révélation nazie de cette taille (et elle susciterait la polémique, notamment sur le fichage des citoyens qu'on sait en plein essor (merci Charlie), mais là, c’est juste impossible. Tout comme il est aberrant de croire que le gouvernement enverrait ses propres agents faire le boulot en uniforme (c'était bien présenté dans le développement, mais ce final...). A force de raccourcis et de simplifications, American nightmare 2 s’enfonce dans la caricature et accouche finalement d’un simple film bis. Certes, le suspense fonctionne gentiment pendant quelques scènes et les parcours en ville procurent leur taux d’adrénaline. Mais les grosses couilles reviennent régulièrement (le héros surarmé aide les autres personnages parce que, il continue à les protéger après le tour de cochon qu’on lui a fait, les snipers sur le toit ne tirent pas un seul coup, la fille nous casse régulièrement les couilles avec ses revendications politiques communistes), et quand arrive la scène du music hall, où les riches tout sourire font monter les enchères pour se payer une chasse au pauvre en mode laser game version purge, c’est plus possible. Les espoirs s’effondrent, les maigres restes (luttes internes, individualisme d’autant plus fort qu’il s’agit de survie, sous texte politique…) survivent et seul la masturbation cérébrale politique que alors compenser les lacunes du film. Reste les scènes urbaines, au suspense parfois efficace. Avec quelques passages un peu glaçants, comme nos personnages passant devant le cadavre d’un trader mis en pièces devant sa maison, à peine gratifié d’un « il l’avait sans doute mérité ».