Le choix fut cornélien, suicidaire, voir regrettable.

Il était 21h, et j’était face à deux films. C’était soit le My two Daddies de Travis Fine, un tire-larme poétique, ou le ardue et controversé American Sniper de Clint, le vétéran.
21H45 - Vous l’aurez compris, Eastwood, en réalisateur « engagé » et Bradley en redneck tellement infréquentable, c’était bien trop tentant. Ayant loupé Jersey Boys, je ne pouvais pas une seconde fois le laisser sur le banc de touche.
Aussitôt dans la salle, et pas peu fière de mon choix, je trépignais déjà d’impatience d’avoir le souffle coupé, la george noué, les yeux grand écarquillés…
J’aurais rêvé que ce film soit mon plaisir coupable du moment, mais non, et c’est agaçant.

Pourquoi me direz vous ?
A cause de ces cinquante petites choses qui pour moi ne fonctionnent pas. 50 ou peut-être moins.. mais l’envie de faire une référence à notre chef-d’oeuvre cinematrographique de ce début d’année était bien trop grande.

1. Bradley en Chris Kyle, ça ne vaut pas Tom Hanks dans Forrest Gump lorsqu’il est au Vietnam.
2. No Way ! Je dis non à la chanson de mariage de Chris et Tara ! "Someone like you" de Van Morison (https://www.youtube.com/watch?v=kGVcKbLPIAE) est réservé à Bridget Jones et ça tout le monde le sait, c’est une hérésie pseudo romantique que d’avoir tenté le diable de cette manière.
3. Chasseur un jour, chasseur toujours ! Comment pervertir une simple après midi de chasse entre père et fils en véritable passion du meurtre froid et irraisonné à la American Psycho - Glaçante cette métaphore.
4. On apprend que Chris a "la passion du jeu », je ne comprends pas que personne n’ait pensé à lui donner un Call of Duty quand il était petit, il aurait probablement fait moins de dégât.
5. Quand Mister Kyle retourne au pays, sa phase de réadaptation passe par la difficulté qu’il a d’entendre des bruits de perceuses, de tondeuses ou de voitures, un peu léger pour un choc psychotique quand même.
6. Ah non j’oubliais, son palpitant n’en peux plus, son coeur est en stress constant… D’accord !
7. Bien que ce soit extrêmement personnelle, la musique manque au film, ça manque de liant, d’un thème récurrent, un je ne sais quoi qui nous captive.
8. Enfin si, le mélo arrive tardivement avec des thèmes patriotiques américains à base de trompètes lancinantes et de pluie battantes.
9. Chris contrôle la mort, mais ne maitrise pas sa vie - aucune empathie !
10. Le nourrisson du film est factice, un vulgaire pantin désarticulé, ça ridiculise Bradley, et ça se voit en instantané - Dommage, un casting de nourrisson ça n’est pas bien compliqué.
11. Holy Bible vs War Bible.
12. « Je rencontrerai le créateur pour répondre de chaque tir » - Une réplique courte qui en dit long sur les States de l’Epoque Bush post 11/09/01… N’est-ce pas ?
13. Chris Kyle était donc Captain America ? Je regrette que Marvel n’y ait pas pensé avant, parce que nous avons affaire à une véritable glorification d’un anti-héros, en personnage au courage honorable.
14. Super-héros sauveur de l’Amérique ou Sniper lobotomisé sans aucun code moral ? à vous de voir.
15. Un tempête de sable mémorable qui n’obscurcie même pas la lunette de tir de précision, tout est normal, simplement Hollywoodien, simplement sympathique à l’écran (Attention minute contemplative).
16. Il n’est peut être ni un loup, ni un mouton - Mais ce cher Kyle vit dans une cage, celle de sa conscience rongée par ses mains tachées de sang.
17. Quand on aime, on ne compte pas, quand on tombe d’un cheval, il faut remonter - Quand on perd ses jambes au combat, on soigne le mal par le mal en allant au stand de tir.. Mais bien sur ! L’adrénaline probablement !
18. Comment Tara ne peut elle pas s’inquiéter quand son mari pointe une arme sur elle pour la soumettre à des jeux sexuels ? C’est mignon tout plein, quoi que glauque.
19. « C’est une chose grave d’arrêter un coeur qui bat, mais il faut le faire » - En plus de cela, le monstre endoctrine sa dépendance, à quand la délivrance ?
20. Boum Badamoum Badaboum Boum Boum.. Sans transition, et sans évolution, on passe des boums de l’Irak aux calme du Texas, c’est affreusement linéaire.
21. On nous fait croire à la fin qu’il aurait pu être élu le superpapa de l’année alors que quelques minutes avant monsieur entendait des voix dans sa têtes assis devant son poste de télévision éteint - Alerte à la Psychose !
22. « Je suis une légende » « Je suis un cowboy » « mon pays est le meilleur pays du monde », Il est le tireur d’élite le plus efficace de l’histoire américaine, mais l’Amérique est très loin du discours du film, la réelle question est celle de la morale.
23. Une réalisation lisse, sans fioriture, droite, qui suit son cours y compris les scènes d’actions qui manquent d’audace, de matière, c’est fade, mais ça respecte le film.
24. Le comble y est atteint à la fin du film quand j’observe le choix de Clint d’élever au rand de héros, sacralisé, la figure du Sniper - Le pleurer serait nous fourvoyer.
25. Est-il parti en martyr de l’Amérique ? Est-il parti la fleur au fusil ? Chacun y verra son interprétation.

Après ces 25 petites nuances de disgrâces, de folies, je vous laisse sur l’ennui et l’amertume que m’a procuré ce film.
Clint est peut-être grand, mais American Sniper n’a rien d’un grand.
L’Art de raconter les effets de la guerre sur ceux qui la font n’appartient pas à ceux qui pensent que la morale régit le conflit.

Soyez d’accord pour être en désaccord.
WoWa
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le 20 févr. 2015

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Mo Ma

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