Avec ses eaux noires et polluées érodant toujours plus ses majestueux palais, Venise est l'incarnation même de la décadence. Ce constat est parfaitement résumé au début des Ames Perdues quand le puissant noble Fabio Stolz décrit à son neveu toute la crasse qui ronge cette ville et les meurtres sordides qui ont lieu en son sein.
Le palais de Stolz, décor principal où se déroule l'action, prolonge d'ailleurs cette idée de déchéance, l'endroit étant ravagé par l'humidité qui menace à tout moment de faire s'écrouler l'édifice. C'est ici que le jeune neveu Tino, héros du film en visite chez son oncle pour suivre des études d'arts, va devoir vivre tout en tentant de percer les mystères entourant sa famille.
Plus qu'un thriller, le film se présente avant tout comme un conte horrifique reprenant le fil de l'intrigue de Barbe-Bleue. En effet, dès son arrivée, Tino reçoit la permission de se promener où il veut dans le manoir excepté dans le grenier du dernier étage, celui-ci renfermant un obscur secret. Cette histoire sombre permet aux acteur principaux, Vittorio Gassman et Catherine Deneuve, d'incarner des personnages à la personnalité trouble et inquiétante, illustrant cette idée que finalement, autant l'être humain que les objets sont soumis à la déchéance
Le film est donc loin des comédies amères qu'a l'habitude de nous proposer Dino Risi. En réalité, le réalisateur renoue ici avec ses anciens amours vu qu'il avait étudié la psychiatrie à l'université. Il parvient ici à traiter de ce sujet avec justesse en l'intégrant dans Venise, ville aussi belle que macabre.