Librement adapté d'un roman de Jean Giono, je retrouve dans Angèle l'humanité chère au cinéma de Marcel Pagnol, avec ce film qui parle si bien de la Provence et des conventions de l'époque.
Une jeune femme, Angèle, fuit avec son amoureux, au grand dam de ses parents, mais elle va se rendre compte que l'homme dont elle est tombée amoureuse est un proxénète qui l'envoie sur le trottoir dans les rues de Marseille. Réussissant à revenir chez elle grâce au valet de ses parents, elle va être disgraciée par son père qui, pour sauver l'honneur de la famille, va la contraindre à l'enfermer, elle et l'enfant qu'elle a eu entretemps, dans une cave.
Ça a beau durer près de 2h30, le film passe comme dans un rêve, car je reconnais très bien ces ambiances du Sud qui me sont si chères, à base de coquin de sort, de fada, de peuchère, et d'autres joyausetés. Mais il en résulte un film très touchant, porté par l'interprétation générale formidable, y compris Fernandel dans un rôle tenu, celui du valet Saturnin, qui est en quelque sorte la bonne âme de l'histoire.
Comme souvent chez Pagnol, on retrouve ce thème de l'enfant seul, sans père, et où la mère est considérée comme un déshonneur pour la famille, et surtout pour le père, joué par Henri Poupon.
Il incarne la droiture, qui va être bousculé par le retour de sa fille et de celui qu'il appelle le bastard.
Malgré la pesanteur de l'histoire, c'est quand même assez léger grâce à Fernandel et Edouard Delmont, qui joue l'ouvrier qui va s'inviter dans la famille d'Angèle, pour qu'il sache où se trouve cette jeune femme. Je retiens cette virée de Fernandel à Marseille où, sorti de la gare St Charles, il est vraiment vu comme un plouc, avec son énorme bouquet de fleurs défraichi, quelque chose comme un Mr Hulot vingt ans plus tôt.
J'ai trouvé ça formidable, et dont le propos n'est pas si éloigné de nos jours où être une mère célibataire peut être encore vécue comme un péché pour la famille. Mais là, avec Marcel Pagnol, l'histoire mêle à la fois humour et émotion, avec des phrases aussi belles que 'Ça ne sert à rien de pleurer, ça fait mouiller'.
C'est un tout petit peu en-dessous de la trilogie marseillaise, qui est un sommet du cinéma français à mes yeux, mais quelle merveille !