Pour son premier et unique film aux USA, Aniki mon Frère, Takeshi Kitano parle de ce qu’il connaît le mieux : les yakuza, la Mafia, la guerre entre les deux, la fraternité et la violence.
Ces cinq éléments se retrouvent à foison dans Aniki mon Frère, un film aussi éreintant que passionnant, doté d’un casting pléthorique (on y retrouve Antwon Tanner, Amaury Nolasco, Omar Epps, Lobo Sebastian, Tatyana Ali Kool Moe Dee…) qui finit quasiment à 100% à la morgue. Car Aniki mon Frère est un film d’une noirceur réjouissante, qui refuse totalement le happy end et ne cède donc pas aux sirènes commerciales. En ce sens, c’est un film profondément japonais, qui n’accentue jamais l’héroïsme de ses protagonistes principaux, tout aussi mauvais que les Mafieux, qu’on ne voit jamais dans le champ. La menace vient d’ailleurs, elle est indescriptible mais bien présente. Et lorsqu’on peut accuser Takeshi Kitano de gore porn, il orchestre une scène déchirante dans laquelle Omar Epps revient chez lui pour voir sa famille assassinée. On ne rentre jamais dans la maison, on reste à la porte pour entendre Epps se lamenter hors champ du sort de sa famille. C’est très efficace, à l’image du score de Joe Hisaishi qui accompagne les pérégrinations de Yamamoto : il est lancinant, jazzy tel un piano-bar dans un hôtel de luxe et pourtant on ne peut cesser de l’écouter. On retrouve aussi ce sens de l’humour inattendu mais sincère dans les scènes de vie commune du cartel de Yamamoto, où les Japonais jouent au basket-ball face aux Noirs et que chacun se prend pour Michael Jordan…
Pour tous ces éléments et ce sentiment d’inéluctabilité quant aux avenirs des cinq protagonistes qui rend le film encore plus émouvant que prévu, Aniki mon Frère est un très grand film. Quelqu’un devrait rassurer Kitano sur sa qualité, lui qui en a publiquement été circonspect.