1975, l'indépendance de l'Angola doit être proclamée le 11 novembre. Mais avant même que les Portugais ne soient partis, la guerre civile éclate entre le MPLA, soutenu par l'URSS et Cuba, le FLNA, soutenu par l'Appartheid, et l'UNITA, soutenue par la CIA. Quand des rumeurs d'invasion par l'Afrique du Sud éclatent, Riszard Kapuscinsky, présent à Luanda, décide d'aller rencontrer le chef de la résistance du MPLA là-bas. Il rencontre sur son chemin de nombreux personnages. Les réalisateurs du film ont retrouvé ceux qui sont encore vivants et les ont interviewés : pour ceux qui auront lu D'une guerre l'autre, il est plutôt apprécié de pouvoir mettre des visages sur des noms.


Le canevas du livre est respecté dans l'ensemble, même si la fin est écourtée (peu de chose sur les Cubains et leur arrivée, sur le siège de Luanda). On se concentre sur le statut ambigu du reporter de guerre : apporte-t-il la mort avec lui, en même temps qu'il apporte la connaissance à la communauté internationale ? Peut-il rester neutre (beau passage sur le cas de conscience face au scoop de la présence cubaine) ? N'attendez pas une vision documentaire, synthétique de la guerre d'Angola. On est toujours à hauteur d'homme, avec des passages oniriques et introspectifs (dont la symbolique est peut-être un peu facile sur la fin).


Le film inclut assez rapidement entre les passages d'animation des prises de vues réelles, avec interviews des vrais compagnons de Kapuscinsky (Arturo, Farrusco, Luis Alberto), et des plans filmés en Angola, à Luanda mais aussi dans le sud du pays (les auteurs ont refait le voyage avec Arturo).


Il y a de belles scènes oniriques, comme celle après la mort de Carlota (la voiture avançant sur un ruban qui se défait, au milieu d'un vide bleuté). Les auteurs ont aussi apporté des idées originales, comme les lignes au sol de l'hôtel désaffecté où vit Farrusco, qui délimitent les endroits où les snipers peuvent tuer.


L'ambiance musicale est cubaine, très agréable, avec aussi un peu de Motown des années 70 et autres morceaux pop.
Le film est un sérieux concurrent de Valse avec Bachir.


Je ne mettrai que deux bémols
- la touche seventies/Blaxploitation est un peu trop forte à mon goût, notamment avec le personnage de Daddy, officier noir avec une chemise ouverte, des lunettes noires et une coupe afro qui arrive en Camaro à Benguela. La touche, pourquoi pas puisque c'est confirmé sur une photo, mais la Camarro n'est pas crédible un seul instant. Evidemment ça peut souligner l'absurdité de la situation, mais bon.
- Il est évident que les interviews des anciens compagnons de Kapusczinsky ont été dramatisées. Ses anciens camarades se prêtent à cette mise en scène : Arturo refaisant la route vers le sud en Angola, Luis allant voir des images d'archives dans un cinéma de Lisbonne... Le mieux est l'ennemi du bien, et cette mise en scène à l'Hollywoodienne a le don de m'exaspérer.


Another day of life (qu'il aurait été bon de traduire D'une guerre l'autre en français, comme pour l'original) est un très bon film sur la guerre d'Angola et le journalisme. N'hésitez pas à le regarder et à le faire regarder, vous ne regretterez pas le voyage.

zardoz6704
8
Écrit par

Créée

le 15 juin 2019

Critique lue 340 fois

4 j'aime

zardoz6704

Écrit par

Critique lue 340 fois

4

D'autres avis sur Another Day of Life

Another Day of Life
limma
8

Critique de Another Day of Life par limma

Premier long de Raúl de la Fuente et du polonais Damian Nenow. pour ce film d'animation alternant le documentaire à la fiction romancée qui retrace un pan d'histoire dramatique de l'Afrique comme...

le 10 déc. 2019

11 j'aime

6

Another Day of Life
seb2046
7

Journalist at war !

ANOTHER DAY OF LIFE (15,1) (Raul de la Fuente et Damian Nenow, ESP/POL, 2018, 86min) : Le percutant Another Day of Life nous replonge de façon saisissante au cœur de la guerre civile d'Angola...

le 24 janv. 2019

5 j'aime

6

Another Day of Life
zardoz6704
8

Joli complément au livre

1975, l'indépendance de l'Angola doit être proclamée le 11 novembre. Mais avant même que les Portugais ne soient partis, la guerre civile éclate entre le MPLA, soutenu par l'URSS et Cuba, le FLNA,...

le 15 juin 2019

4 j'aime

Du même critique

Orange mécanique
zardoz6704
5

Tout ou rien...

C'est ce genre de film, comme "La dernière tentation du Christ" de Scorsese", qui vous fait sentir comme un rat de laboratoire. C'est fait pour vous faire réagir, et oui, vous réagissez au quart de...

le 6 sept. 2013

57 j'aime

10

Black Hole : Intégrale
zardoz6704
5

C'est beau, c'est très pensé, mais...

Milieu des années 1970 dans la banlieue de Seattle. Un mal qui se transmet par les relations sexuelles gagne les jeunes, mais c'est un sujet tabou. Il fait naître des difformités diverses et...

le 24 nov. 2013

43 j'aime

6

Crossed
zardoz6704
5

Fatigant...

"Crossed" est une chronique péchue, au montage saccadé, dans laquelle Karim Debbache, un vidéaste professionnel et sympa, parle à toute vitesse de films qui ont trait au jeu vidéo. Cette chronique a...

le 4 mai 2014

42 j'aime

60