Dans la lignée de plusieurs films très critiques sur l'engagement américain au Vietnam (même si la guerre est ici vue du côté américain, la critique n'en est que plus forte), Francis Ford Coppola ne réalise pourtant pas un film de guerre, mais plutôt un film sur la guerre : le parcours du capitaine Wilard sur un fleuve hostile qui le mène au colonel Kurtz ressemble à un voyage intérieur, une introspection (la voix off de Wilard est récurrente tout au long du film). C'est un voyage vers la folie et l'horreur de la guerre, qu'incarne le colonel Kurtz, un Marlon Brando massif et effrayant. Chef d’œuvre onirique, envoûtant, magique, "rock'n'roll" et moralement dévastateur, "Apocalypse Now" sera sans aucun doute le film-somme de notre époque. [Critique écrite en 1980]
PS : Il est intéressant de réaliser que 20 ans après, c'est bien la dernière partie de "Apocalypse Now", psychédélique et hallucinée, et assez violemment critiquée lors de sa sortie, qui fait du film un chef d'œuvre, et non plus la ballade à travers la guerre du Vietnam, moins impressionnante sans doute parce que de nombreux films "de guerre" ont depuis retravaillé ces visions apocalyptiques de destruction. Francis Ford Coppola avait une véritable avance sur son temps, même si la réalisation de "Apocalypse Now" lui a coûté une partie de sa santé mentale et de sa fortune... [Critique écrite en 2000]