Le grand Jimmy Page l'avait bien compris en étirant sans fin ses meilleurs solos de guitare, démontrant ainsi pour le plus grand bonheur du fan transi des qualités de persévérance et d'endurance qui ne diminuaient en rien sa dextérité bien connue. Il rajoutait ainsi (toujours pour le fan transi) à l'énergie du blues rock une nuance fortement hypnotique . Moralité: il faut savoir ren-ta-bi-li-ser un chef d'oeuvre.
De même Francis Ford Coppola a rajouté des scènes montrant son savoir-faire dans des domaines qu'il avait jusque là rarement abordés. Il nous fait sourire quand le colonel se fait piquer sa planche de surf et envoie les hélicos pour essayer de la récupérer. Il nous rince l'oeil avec les playmates réquisitionnées dans le bordel militaire. Il joue la carte de l'exotisme (pour les Américains) en montrant une plantation peuplée d'irréductibles Français. Et il réussit à transformer ce chef d'oeuvre du film de guerre en film culte, c'est à dire en film...fleuve (c'est facile) interminable et hypnotique. Et les littéraires pourront comparer à loisir les étapes de la remontée du fleuve avec les cercles de l'Enfer de Dante. Mais rajouter près d'une heure de film ne se fait pas impunément. Cela provoque des moments d'assoupissements inévitables pour le travailleur fatigué par une dure journée de labeur, au moment où le légendaire Marlon Brando apparaît enfin, méconnaissable et filmé dans la pénombre pour être un tant soit peu crédible. Simples petits dommages colatéraux, diront les fans du film.
Est-ce bien nécessaire d'infliger au spectateur des films de plus de 3 heures d'une manière générale ? Tout le monde n'a pas une âme de marathonien. Bravo quand-même à Coppola pour avoir réussi le pari de recycler son Apocalypse 20 ans après.