Gros échec critique et commercial à l'époque, « Bring Me the Head of Alfredo Garcia » fut pourtant, selon ses propres dires, le seul film de Sam Peckinpah sorti comme il l’entendait. Le fait que le film a été tourné au Mexique avec beaucoup de locaux, loin d’Hollywood, a sans doute aidé. De même, la réputation du réalisateur a probablement permis au film de ne pas sombrer dans l’oubli, et de se constituer une petite réputation au fil du temps. Certes, mais que vaut le produit ?
Le scénario démarre sur une idée assez géniale : un gangster mexicain met littéralement à prix la tête d’un certain Alfredo Garcia, qui a engrossé sa fille. C’est alors qu’un barman miteux saisit sa chance, sachant qu’Alfredo, qui est aussi l’amant de sa petite amie, est en réalité mort et enterré depuis peu. Récupérer sa tête (et la récompense qui va avec) devrait donc être une partie de plaisir…
L’œuvre est à l’image de ce pitch, à savoir crasseuse et nihiliste. On suivra ce protagoniste décrépit, les lunettes de soleil vissées sur le crâne, la bouteille de tequila et le pistolet toujours à proximité, qui voit là une sinistre opportunité de changer sa vie. Ce personnage de loser complet, tellement vautré dans la médiocrité qu’il est prêt à tout, parla visiblement beaucoup au réalisateur, puisque l’on trouve plusieurs similitudes entre les deux hommes !
Le souci est que l’ensemble contient pas mal de maladresses ou de fautes de goût. Une première heure qui se traîne une fois passé l’introduction. Des scènes inutiles et/ou gratuites (pourquoi cette confrontation avec des bikers ?). Hormis les deux protagonistes, des personnages non développés qui ont certes une valeur symbolique, mais pas d’épaisseur (notamment les gangster interchangeables). Des acteurs qui semblent parfois à l’Ouest. La rumeur raconte qu’alcools et stupéfiants ont été allègrement consommés sur le tournage, ce qui expliquerait la chose…
Et c’est dommage, car la patte de Peckinpah, bien visible avec entre autre ses fameuses fusillades avec ralentis et changements de plan, convient bien à cette histoire sordide. Et si la violence du film, aussi bien graphique que dans les situations, a visiblement choqué à l’époque, elle est aujourd’hui anecdotique, mais participe à cette atmosphère malpropre. De plus, la vision sans concession du Mexique est intéressante : l’histoire a beau se dérouler dans les années 70, on a souvent l’impression d’être un siècle plus tôt ! Bref, des idées et des éléments pertinents, mais qui ne suffisent pas à pallier les défauts de l’œuvre.