Takashi Koizumi met en scène un des derniers scénarios d'Akira Kurosawa. Adaptation du livre de Shūgorō Yamamoto Ame agaru, dont s’est inspiré Kurosawa avant de laisser la main à son assistant qui réalise son film sur les notes laissées par le cinéaste. (Barberousse est également une adaptation de l’écrivain et Takeshi Miike pour Sabu).
L’histoire se déroule au XVIIIème siècle dans un coin perdu du japon où nombre d’hommes et de femmes se retrouveront coincés dans une auberge, la crue empêchant de traverser la rivière pour continuer la route.
Ne connaissant pas assez le cinéma de Kurosawa j’ai pu retrouver quelques clin d’œil. On retrouve les plans plutôt larges sur les protagonistes, le héros et la nature, notamment cette pluie puissante qui n‘en finit pas de tomber. Ce sont des thèmes, me semble-t-il cher à Kurosawa. Toutefois je considère ce film comme un travail original malgré l’hommage au réalisateur. Il y aura peut-être moins de scènes grandioses et de plans de caméra multiples comme dans les 7 samouraîs par exemple où le combat final sous la pluie jonglait en tout sens...et les décors ici sont réduits.
On retrouvera par contre, ces fameux instants de discussions dans cette auberge remplie où dialogues incessants et partages sont à l’oeuvre, un peu trop longues d'ailleurs, surfant sur la théâtralité.
Ihei Misawa (Akira Terao « RAN ») notre samouraï sans maître, prend de la place et les femmes réduites au minimum. Tayo (Yoshiko Miyazaki) son épouse se dévoilera légèrement dans un changement subtil de femme soumise et décrit le Japon féodal. L’homme étant préoccupé de la vie qu’il fait mener à son épouse oscille entre choisir un maître ou vivre d’aventure et de liberté.
Alors Après la pluie c’est un arrêt sur image et du temps, en attendant le moment où la vie reprendra son cours. Le moment de la réflexion. Mais notre homme qui met les pieds dans le plat est un homme fondamentalement libre, combattant émérite dans l’art du kenjutsu, il met souvent des raclées à ceux qu’il croisent même si ceux-ci sont des seigneurs. Les scènes de combat sont efficaces et d’une désinvolture jubilatoire (technique du jidai-geki ou chanbara : l’attente avant le combat rapide et expéditif est étonnante...). Les décors et les costumes invitent au voyage et les bruits de la pluie incessante confèrent à l’ensemble une douce nostalgie et nous livre une sorte de huis-clos poétique.
Evidemment Koizumi met en avant l’humanisme que Kurosawa distille dans ses oeuvres, l’homme altruiste, la solidarité, la liberté et la réticence aux conventions. Le samouraï solitaire qui défendra les paysans. Notre héros navigue avec autant d’allégresse que d’insouciance au fil de l’intrigue. Le sens de l’honneur et la tendresse envers les laissés-pour-compte sont bien présents. On ressent un sentiment de bien-être à suivre les déambulations tranquillement réflexives de notre héros, sur les chemins forestiers...Viendra la rencontre avec le seigneur lui-même bien campé par Shiro Mifune, fils de. Un seigneur de bon augure au tempérament un peu vif parfois. De bons moments pleins d'humour pour deux antagonistes qui s’avèrent bien plus proches l’un de l’autre que ne le laissait supposer leurs rangs. Le seigneur attendant de Misawa une aide à sa propre servitude de seigneur mal accompagné, et notre samouraï rêvant de pouvoir enfin être accepté en tant que tel. La piètre escouade du seigneur laissant toutes les chances au samouraÎ de pourvoir ce poste et d'assurer sa sérénité financière mais Misawa sera rattrapé par son passé et par son tempérament impulsif.
Et tout aussi tranquillement, un final pour un beau pied de nez à la servitude.
Un film à voir et à découvrir. Un conte plein de charme à apprécier comme une savoureuse journée bucolique, éclairée parfois par des fulgurances musicales étonnantes et un sentiment de légèreté nous laissant pleinement satisfait.