Si Hayao Miyazaki avait signé la réalisation de ce film, nombreux auraient été ceux qui auraient crié par défaut au chef d'oeuvre. Devenu une vache sacrée absolue de l'animation, l'objectivité n'est plus de mise.
Mais Hayao Miyazaki n'a pas réalisé ce film. Il a signé le scénario. A ce niveau, la filiation est évidente. Arrietty est bien un personnage typique de Miyazaki, héroïne forte et indépendante. On retrouve également l'importance de la nature, un goût certain pour l'adaptation de contes enfantins british (à l'instant de Le Château Ambulant).
Septuagénaire fatigué, Hayao Miyazaki a confié la réalisation à Hiromasa Yonebayashi. Propulsé réalisateur, ce dernier nous en avait pourtant déjà mis plein la vue graphiquement en tant qu'animateur principal pour Le Voyage de Chihiro ou le Château ambulant. Nier la filiation graphique entre Arrietty et ces deux films est quasiment impossible...
Que dire du film en tant que tel ? Graphiquement, c'est superbe, la qualité d'animation n'a rien à envier aux mastodontes du studio Ghibli. Le jardin est une ode à la végétation foisonnante, variée et colorée, les décors de poupées sont magnifiques, ciselés à l'extrême. La fluidité de l'image malgré ce luxe de détails est parfaite. S'il est un point qu'on pourrait regretter, c'est l'absence de prise de risque. De fait, l'univers visuel d'Arrietty est calqué sur celui des derniers films de Miyazaki (Logique me direz vous puisque Yonebayashi en était l'animateur...), on est tout sauf dépaysés. Qu'importe après tout.
L'histoire s'inscrit dans la continuité des films "simples" de Miyazaki, adressés à un public enfantin jeune, très jeune. Une absence de méchant véritable, un manichéisme affirmé, une héroïne forte, un erzatz de sorcière avec le personnage de la gouvernante traquant les chapardeurs, une rencontre simple et touchante... Mignon. Sans plus.
Peut on voir dans Arrietty un passage de témoin ? Plus convaincant que Miyazaki fils, Hiromasa Yonebayashi peine encore à se démarquer de l'ombre écrasante de Miyazaki. J'espère pour lui qu'il saura s'emparer de projets en dehors de la sphère du maitre, afin de s'affirmer, de nous proposer son propre monde. Sera-t-il aussi riche et particulier ? Il est permis d'en douter...
Terminons tout de même sur le meilleur point du film. Sa musique. Signée Cécile Corbel (Première BO Ghibli signée par un artiste non japonais), les notes égrenées de sa harpe celtique alliées à sa voix diaphane accompagnent superbement ce conte. Pour l'avoir connue et vue en concert avant sa "reconnaissance" via ce film, j'étais enthousiaste à l'annonce de sa participation au projet Arrietty. Découvrir cette BO fut un bonheur en tant que tel tant elle s'inscrit parfaitement dans la discographie de cette artiste que je vous encourage à découvrir.
Si Arrietty, le petit monde des chapardeurs n'est pas un Hayao Miyazaki ou un Isao Takahata, il n'en est pas moins une franche réussite, avec un réalisateur qui ne demande qu'à s'affirmer et prendre la relève au sein d'un studio qui en a bien besoin...