Le documentaire est centré sur le restaurant de la famille Arzak, situé dans un faubourg sans charme de Saint-Sébastien depuis 1897, au bord d’une route passante et dont le petit-fils des fondateurs, Juan Mari (fils unique) a donné ses lettres de noblesse après en avoir pris la direction en 1966 (à 24 ans) en compagnie de sa mère [
qui avait refusé qu’il fasse l’école hôtelière (intégrée quand même, en falsifiant la signature de sa mère !) et lui conseillait d’être aimable avec les fournisseurs]
: il obtient sa 1ère étoile au guide Michelin à 32 ans et sa 3e en 1989 à 47 ans. Dans les années 1990’, sa fille Elena le rejoint, à 24 ans, en passant 1 mois à chaque poste du restaurant et fait ses armes à l’étranger (Suisse et France notamment). En 2012, elle est sacrée meilleur chef du monde en recevant le prix Veuve Clicquot. Le réalisateur, qui a répondu à une commande, a fait le choix de se focaliser sur la transmission, entre Juan Mari (78 ans, à l’âme d’enfant, ayant toujours des projets, craignant manquer de temps pour les réaliser et souhaitant mourir aux fourneaux) et Elena, 51 ans (sa sœur Marta travaille dans le monde des arts) qui constitue la 4e génération. Le thème est bien visible dans l’affiche du film avec les portraits du père et de la fille, l’un regardant vers la gauche (= le passé) et l’autre vers la droite (= le futur). Malheureusement, on reste un peu sur sa faim (sic) car on aurait aimé en savoir plus sur le talent et l’innovation que Juan Mari Arzak a apportée à la cuisine basque et espagnole, en plus du fait qu’il emploie des produits locaux et des ingrédients du monde entier (un peu court comme explication). L’élaboration d’un plat emblématique aurait été la bienvenue (sans tomber, bien sûr, dans l’émission de cuisine). Le réalisateur se contente de faire un portrait des 2 chefs (avec des images banales de leur vie quotidienne) comme il aurait pu le faire pour d’autres professions (même si celle-ci est très masculine) :
on y voit Juan Mari aller chaque jour à son restaurant, s’installer à une table et converser avec le personnel (il ne retient pas les prénoms asiatiques !), prendre le funiculaire qui monte au sommet du Mont Igueldo, faire une partie d’auto-tamponneuses, participer à une course automobile miniature et sa fille.
Il manque l’intégration d’une partie pédagogique au documentaire : expliquer l’apport de la nouvelle cuisine basque (créée à l’initiative de 11 chefs), elle-même influencée par la nouvelle cuisine française [initiée en 1973 par les critiques gastronomiques Henri Gault et Christian Millau et développée par les chefs Michel Guérard, Paul Bocuse (Juan Mari l’a rencontré), les frères Troisgros, Alain Senderens]. Cette approche est esquissée au début du film en expliquant que la cuisine basque repose sur 4 couleurs (celle du drapeau basque) : rouge, vert, blanc et noir
mais elle se limite à quelques belles images de mélange de sauces colorées, rappelant la cuisine moléculaire ou de seiches trempées dans du jus de betteraves.