Rien est vrai, tout est permis.

En moins de 15 jours je me suis gavé niveau cinéma : "Premier Contact" tout d'abord, puis "Rogue One". Deux films qui se sont avérés excellents de mon point de vue, et cette sainte quinzaine s'est
terminée hier avec "Assassin's Creed".

Bon déjà, pour faire un topo rapide : je suis fan de la saga vidéoludique, du moins de la période Altaïr/Ezio (un peu le 3, jusqu'à la fin invraisemblable, avant qu'Ubisoft parte en couille). Soit, on est pas la pour parler jeux-vidéos mais les adaptations sur grand écran des œuvres de JV étant rarement bonnes, disons que ça pose le background de mon état d'esprit lors du visionnage du film.
Mais, j'ai essayé de ne pas trop y penser pour partir sur une base "neutre".

Honnêtement et on va le dire tout de suite : c'est pas bon. Mais vraiment pas bon.

Le casting sur le papier pouvait nous faire espérer au moins un beau et bon jeu d'acteur : Fassbender, Cotillard, Irons, Rampling, Gleeson pour ne citer qu'eux (d'ailleurs je ne cite qu'eux). Mais franchement, quasiment dès le départ tu sens qu'ils ne sont pas concernés par ce film, limite qu'on leur a mis un flingue sur la tempe pour y jouer dedans. J'ai eu l'impression durant tout le film qu'eux mêmes n'y croyaient pas, ou très peu. On sent aucune implication des acteurs dans le projet de cette adaptation.
Fassbender, sans être dans un registre dégueulasse, récite son texte comme un mauvais cosplayeur grimé d'une capuche et d'une lame secrète comme l'on peut en voir dans de mauvaises conventions. Cotillard, sans être le degré zéro au niveau de l'acting (je ne déteste pas cette femme en passant), est insipide, vraiment. De plus son auto doublage est complètement raté. Aucune expression dans la voix, aucune tension, aucun sentiment. Elle doublerait parfaitement Marion Cotillard dans le rôle d'un robot dénué de sentiment qui jouerait le rôle de Marion Cotillard dans une mise en abime extrême (par contre jolie coupe de cheveux, ça lui va bien).
Les ainés Rampling et Irons sont dans le même registre. Insipides, aucun charisme qui émane de la puissance malveillante d'Abstergo au travers de ces deux antagonistes. Tu ne ressens jamais réellement une menace puissante et forte, et ça me fait un peu penser au téléfilm américano/allemand qui passe à 14h sur une chaine obscure de ta freebox : un scénario sur un post it, du méchant qui menace la Terre car il détient les plans secrets d'une super arme bacteriologique, et basta.

Niveau scénario justement (y'a des spoils).

L'histoire se passe durant l'inquisition espagnole à la fin du XVème siècle. Choix qui ne m'a pas plu (c'est purement subjectif je l'avoue), mais qui a le mérite d'emprunter un nouveau pan de l'Histoire qui n'avait jamais été évoqué dans la série de JV. Alors certes, l'Andalousie ça nous fait penser aux zones désertiques, à une chaleur écrasante. Puis l'Inquisition et sa terreur.
Mais honnêtement, mis à part une scène ou notre ami Aguilar avec son mentor et sa compagnonne (alors apparemment elle se nomme Maria, mais de mémoire son nom n'est jamais mentionné dans le film) vont se faire brûler sur la place d'une ville random (toujours pareil, me semble que c'est Grenade) et arrivent à s'extirper de leurs bourreaux et partent en mode parkour -scène qui est foutrement bien faite, nerveuse à souhait- je n'ai rien retiré d'autre des scènes du passé. Je m'explique.

Dans la mythologie d'Assassin's Creed l'animal totem, si je peux appeler ça comme ça, est un aigle. Et à chaque ouverture d'une scène dans le passé on suit un aigle en plongée qui va, avec son vol, nous présenter le lieu ou vont se passer les 10 prochaines minutes. Alors, faire un rappel par rapport à ce détail c'est cool, mais le mettre automatiquement peut sembler extrêmement long et pompeux. Surtout, je n'ai été aucunement transporté justement durant cette époque avec ces longs plans de survols de la future scène. Je trouve les effets spéciaux pas mauvais, mais très loin d'être transcendants. C'était peut être "trop" si j'ose dire. A force de trop vouloir en montrer justement on passe à côté du but escompté, et le spectateur que je suis n'a pas apprécié. C'est saturé, froid, brouillon et nous fait entrer aucunement dans l'histoire du film.

Ensuite l'enchainement, le rythme.
Grosso merdo le film s'ouvre avec l'intronisation d'Aguilar au sein de la confrérie des Assassins. Le credo est respecté "Rien est vrai : tout est permis", y'a le mentor qui fait son speech et qui coupe le doigt d'Aguilar pour que ce dernier ne se blesse pas en utilisant sa lame secrète. Donc la honnêtement on part sur deux bons points : le respect d'une partie de la mythologie. Alors oui vous allez me dire qu'ils ne pouvaient pas passer à côté, mais justement quand on voit certaines libertés dans ce genre d'adaptations on pouvait craindre un total WTF d'entrée de jeu.

Mais justement, le ouate ze phoque arrive tranquillement quelques minutes plus tard.
En 15/20 minutes maximum, on a : l'intronisation d'Aguilar dans le passé, le meurtre de la mère de Callum en 1986 par son père (qui est un assassin), l'exécution de Callum en 2016, l'enlèvement de ce dernier par Abstergo, son réveil dans la "base" d'Abstergo à Madrid, et son premier passage dans l'Animus.
Aucun background, aucune présentation digne de ce nom des protagonistes/antagonistes, rien. On te parachute tout ça en 20 minutes (et encore je suis gentil) et démerde toi.

Alors certes, il y a quand même un minimum de background :
On apprend qu'Abstergal cherche le remède contre la violence des Hommes entre eux, et ce secret serait détenu dans une "Pomme d'Eden", artefact sacré que se disputent les Templiers (Abstergo) et les assassins depuis des centaines d'années mais pour une utilisation différente. On a un topo vite fait que cette même entreprise recherche des lignées d'assassins ayant été en possession de cet artefact, dans le monde contemporain, d'ou l'enlèvement de Callum qui est censé, en plus, être le dernier "assassin connu" à ce jour.

Mais putain, c'est tellement survolé que ça en est presque indécent. Sérieusement. Une construction basée sur la durée, plus fouillée, en enlevant certaines scènes aurait eu plus de poids pour amener le spectateur lambda qui ne connait rien à la saga à s'identifier aux protagonistes pour mieux rentrer dans le film et comprendre les tenants et les aboutissants.

Bref, le film enchaine avec une succession de scènes dans le présent et dans le passé. Ces enchainements sont brouillons dans l'ensemble. Fassbender est parachuté via l'Animus dans une époque et rien n'y est expliqué : il est la, il fait ce qu'il doit faire et basta. C'est comme si on racontait une histoire sans en décrire quoi que ce soit, par exemple "Je sauve le prince des Templiers puis je me retrouve immédiatement sur un bûcher dans la scène suivante". Il aurait fallut que les scénaristes prennent le temps de mettre deux lignes dans leur scénario du style "Bon alors la Callum on t'envoi à [insérez une ville lambda] parce que suite à ta précédente synchronisation dans l'Animus tu as [insérez un élément scénaristique]". La quand Callum est dans la peau de son ancêtre il doit aller d'un point A jusqu'à un point B et rien est expliqué, tout est encore une fois survolé, comme s'il fallait absolument mettre une/des scènes dans le passé uniquement dans le but d'en mettre. Y'a encore une fois aucun background sur Aguilar, qui nous permettrait de nous identifier à lui et d'avoir une certaine empathie envers son clan, son crédo, sa cause. Ces scènes sont la parce qu'il en faut, point barre.

Je vais passer outre cet Animus "bras robotisé" qui n'a rien à voir avec l'original, mais encore une fois il fallait bien placer des scènes d'actions pendant que Callum est dans l'Animus et que la scène se passe dans le présent. A mon sens c'est encore un mauvais choix, car sans reprendre le jeu vidéo si on avait eu droit à un Animus "de la même sorte" que ceux utilisés dans ce dernier, on aurait eu beaucoup plus de facilités à s'identifier à Callum lorsqu'il explore les premières fois son passé génétique. La le mec dès la première fois fait des sauts de oufs, maitrise parfaitement la synchronisation avec son aïeul et fatalement on y croit pas une seule seconde. Surtout que sa première synchronisation se passe 15 minutes après le début du film (cf le début de la critique).

Pour terminer sur la phase scénario et avant de conclure définitivement cette critique (car je me rends compte qu'elle n'est deja que trop longue, et que j'ai perdu suffisamment de temps dessus pour un film qui n'en vaut pas forcément la peine), il y a forcément la phase ou arrive un twist voire même deux. Mais alors les twists du pauvre.

Ce qui était tellement prévisible arriva : il y a d'autres sujets au sein d'Abstergo, qui comme pour Callum, sont des descendants directs de puissantes lignées d'assassins mais qui ne sont plus utilisés. Donc voila : avertissement supers bien ficelés de ces derniers envers Callum qui est encore en phase rebelle, s'en suit une grosse rébellion de ces derniers épaulés par Callum contre les Templiers actuels, évacuation du grand pope Irons qui sait ou se cacher le fameux artefact. Du grand téléphone filaire quoi.
Le second twist se passe à Londres, à la loge des Templiers. Irons dit à sa fille (Cotillard) qu'en réalité la Pomme d'Eden sert à annihiler le libre arbitre des gens. Donc la forcément la meuf elle est pas trop d'accord, et tu sens qu'elle est dans une tension extrême vis à vis de son père, car elle comprend que mine de rien ce dernier la bien menée en bateau, mais comme il faut.
Environ 2 minutes plus tard dans cette même loge, Callum avec ses deux potes assassins rencontre "par hasard" Cotillard qui est seule et qui n'assiste pas à l'avènement de son père par sa confrérie.
S'en suit une petite discussion entre elle et l'assassin, et cette dernière n'arrête pas Callum qui va tuer son père.

Donc la, de prime abord je me suis dit qu'elle était tellement honteuse de s'être faite manipuler par son père et par extension les Templiers qu'elle ne pouvait plus embrasser leur cause, car elle sait les réels buts de ces dernier à savoir asservir le monde. Et je m'attendais à ce qu'elle "rejoigne" si j'ose dire, la confrérie des assassins à un degré plus ou moins poussé.
Et bien non. Son père se fait tuer par Callum pendant qu'il était entrain de jouer avec la pomme devant ses potes, et cette dernière malgré le fait qu'elle se soit faite manipuler décide de se venger dans le futur opus (car oui, il y en aura un autre). Tout ce qui est logique relève de l'illogique, et par contre ce qui est illogique reste illogique.

Rien est vrai, tout est permis.
Le saint crédo des assassins résume à lui seul l'ambiance générale et mon ressenti sur ce film. Des acteurs qui font sentir qu'il ne sont pas concernés par le projet, pas de charisme, une histoire bancale et trop souvent mal amenée, un background quasiment inexistant. Cet adaptation aurait pu être bien meilleure que ce qui nous est proposé ici si les gens à la tête de ce film avaient voulu prendre plus leur temps pour expliquer les choses. A la place nous avons un déchainement de scènes qui n'ont pas forcément de sens et qui relèvent parfois de l'inutilité la plus totale avec une vacuité niveau réalisation et mise en scène.
Alors non, adapter un jeu-vidéo en film à mon sens n'est pas si difficile que ça, si on sait bien s'entourer et qu'on comprend comment fonctionne le produit que l'on veut mettre sur grand écran. Ici il fallait juste faire un film sur Assassin's Creed, la seule année ou aucun jeu ne sort depuis 2008 pour nous dire inconsciemment "et les mecs on vous oublie pas". Ne vous inquiétez pas, personnellement je vais vite oublier votre film.

Rien est vrai, tout est permis. Merci.