Le projet avait tout pour faire peur à son annonce. C'est vrai, le dernier Astérix animé en date avant celui-là, c'était le pas terrible Astérix et les Vikings (sans oublier qu'on a subit entre temps l'épouvantable Astérix aux jeux olympiques et le très moyen Astérix et Obélix : Au service de sa majesté), et voir le petit gaulois subir un lifting en 3D avait de quoi éveiller la colère des puristes. Mais savoir Alexandre Astier, créateur de l'excellente série Kaamelott, aux commandes, en compagnie d'un ancien de Pixar, Louis Clichy, ça rassurait un peu, on pouvait s'attendre à quelque chose qui fonctionne tant sur le plan scénaristique que sur le plan visuel, surtout en s'attaquant à un gros morceau comme l'excellent tome Le domaine des dieux.
Et dès les premières secondes, on se rend compte qu'on ne s'est pas trompé et que Clichy et Astier ont trouvé la recette pour remettre Astérix au goût du jour tout en satisfaisant les fans des anciens Astérix animés comme Les douze travaux d'Astérix et Astérix et Cléopâtre et ceux qui ont grandi avec Astérix en BD. On s'aperçoit qu'on a droit à un visuel 3D travaillé et qui fait honneur à l'univers du petit gaulois moustachu, notamment dans le design des personnages bien réussi.
Et l'univers d'Astérix n'est pas seulement respecté dans son animation, mais aussi dans son humour. Alexandre Astier réussit le tour de force de marier son style d'humour absurde avec celui d'Astérix, et ça marche parfaitement. Hormis deux ou trois références qui n'ont pas leur place (notamment Obélix en mode King Kong, il faut avouer que ça ne marche pas), l'humour du film est extrêmement réussi, dans les dialogues (le fameux coup des romains qui croient qu'on les appelle), dans les gags visuels dignes d'un cartoon (une jouissive séquence de baffes sur des romains sur Le beau Danube bleu), et dans les références (le jingle de RTL pendant le combat de gladiateurs, ou encore Ordralfabétix qui crie "Je vous ai compris !"), en plus de reprendre quelques excellents gags tirés de la BD comme Obélix qui ne sait pas à quelle vitesse pousse un arbre d'habitude. Bonus pour cette magnifique scène où Astérix et les autres gaulois font semblant d'avoir pris de la potion magique.
Sur le plan scénaristique, le film fonctionne également très bien en plus de proposer quelque chose d'intéressant. Pendant la première moitié, le film reprend les grandes lignes du tome, avant de partir sur une tournure différente de celle de la BD dans sa seconde partie, avec les gaulois qui décident de vivre au domaine des dieux, laissant le village sans protection. En plus de cela, les derniers Astérix avaient pour gros défaut une romance totalement inintéressante, de même pour les deux derniers films live, ce que par miracle ce film évite, en instaurant plutôt une relation entre Obélix et le petit Apeldjus classique mais nettement plus sympathique, c'est vraiment agréable de faire autant ressortir le côté attachant d'Obélix.
Du côté du doublage, il fallait s'y attendre, Alexandre Astier en profite pour inviter beaucoup d'humoristes et de ses amis de Kaamelott, et ça donne droit à mon principal problème avec ce film : Guillaume Briat en Obélix. Ce n'est pas une question d'habitude avec les voix de Jacques Morel et de Pierre Tornade dans les anciens films puisque Jacques Frantz faisait un très bon travail dans Astérix et les Vikings, c'est simplement que la voix de Briat ne correspond pas du tout. Heureusement, dans l'ensemble les doubleurs font du bon boulot, particulièrement Laurent Laffite qui nous livre un excellent Duplicatha. Sans oublier bien entendu le vénérable Roger Carel, toujours parfait en Astérix.
Le plaisir de retrouver ses personnages préférés de la saga de BD est toujours intact. Les gaulois sont toujours aussi savoureux, d'Ordralfabétix à Assurancetourix, ils nous livrent tous beaucoup de moments de rigolade. César est toujours aussi drôle dans ses manières blasées face à la victoire des gaulois, les esclaves apportent également de quoi rire, notamment l'hilarant Duplicatha, tant dans son vocabulaire que dans ses manières, ce personnage est savoureux. En prime, des romains toujours aussi stupides mais aussi un peu plus menaçants que d'habitude, ce qui n'est pas pour me déplaire.
En bref, une immense réussite que cet Astérix : Le domaine des dieux. Avec un profond respect pour l'univers avec lequel chacun d'entre nous a grandi, Alexandre Astier et Louis Clichy livrent un dessin animé foutrement réjouissant, une adaptation inventive et réussie à presque tous les niveaux, que l'on suit avec un plaisir de grand enfant qui redécouvre avec joie ses gaulois préférés après une série de films qui n'ont pas réussi à leur rendre autant justice. Et qu'est-ce que ça fait du bien !