Tout au long de son dernier effort, comme s'il était à côté de nous dans la salle, on peut entendre Wes Anderson sangloter, du genre « Bouhooouuuu ! Pourquoi ils n'ont pas aimé mon The French Dispatch ??? ».
Car Asteroid City n'a pu être envisagé qu'en réaction à ce supposé faux pas, ce film décrété de trop par la critique tiédasse et le fan qui, soit disant, n'y retrouvait pas ses petits.
Voilà donc la formule magique pour inhiber l'artiste.
Car Asteroid City se plante devant vous comme un best of du cinéaste, reprenant nombre des motifs de ses films les plus adulés, ses compositions de cadre au millimètre, ses maquettes et son sens de l'absurde.
Sauf que Wes Anderson oublie une seule chose dans son dernier film : ses émotions.
Et une autre, au passage, les mettre au services d'une histoire.
Ce qui s'annonce donc comme un nouveau délire dont l'artiste avait le secret se fanera beaucoup trop vite, même si le film ne fait qu'une heure quarante. Et fera de son confinement un assez gros surplace avant de faire descendre des étoiles une soucoupe volante. Sauf qu'aucun acte, qu'une scène ne mènera vers une résolution et n'ira pas plus loin que le gimmick, le recyclage de motifs et l'agitation de personnages vides en guise de métaphores pas très fines.
De sorte que Asteroid City ressemblera à l'issue de la projection à une séance de psychothérapie grandeur nature pour Wes Anderson l'enchanteur de cadres, Wes Anderson l'auteur ou encore Wes Anderson le directeur d'acteurs, à l'image de cette transparente confrontation et bien lourde entre Jason Schartzman, une des muses du réal, et Scarlett Johansson, sosie délavé de n'importe quelle actrice de l'âge d'or.
Ainsi, pour la première fois, l'inspiration et la légèreté habituelles pointent aux abonnées absentes, tandis que l'humour absurde de Wes tourne désormais souvent à vide, à l'image de cette poursuite pétaradante en voiture qui traverse l'écran à intervalle régulier, que l'on jurerait issue de Rubber par sa gratuité.
Au point qu' Asteroid City ne génère, parfois, qu'un ennui poli, malgré les splendides couleurs, les décors investissant l'image, les mouvements de caméra maniaques ou encore les souvenirs de ces films passés auxquels il fait écho.
On sent Anderson éprouver une certaine frousse à l'idée de se heurter à un nouvel échec et, à l'évidence, son nouvel opus en est la parfaite traduction, tellement il semble paralysé, tant son seul objectif est de renouer avec les succès certifiés de bon goût par la critique.
Sauf que, manque de bol, Wes a oublié en route les émotions et la mélancolie dont il irrigue normalement ses œuvres.
Sauf que, manque de bol, Wes en a oublié, en 2023, de raconter quelque chose. Il aurait mieux fait d'oublier cette structure méta artificielle de son propos aux allures d'auto-analyse.
Le film mineur du bonhomme n'est sans doute finalement pas celui qu'on croit.
Behind_the_Mask, pas très folle du désert.