Le maître du haut chaos
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« Athena » représente pour moi l’aboutissement culturel du centrisme, un aboutissement bien mûri durant des décennies de représentation bourgeoise et fantasmé de la banlieue. C’est extraordinaire tant, le film est indigent, d’un discours politique maladroit au point d’en subodorer une lâcheté politique crasse.
Le film de banlieue à la Française, ce n’est pas vraiment autre chose que de filmer des « jeunes » contre la police. On ne filme pas d’infirmières, d’assistante sociale ou d’ouvriers, ce serait bien mal connaître les bandeurs de cités, majoritairement bien confortablement résidents des beaux quartiers sécurisés. Mais à la limite, pourquoi pas… La violence des banlieues étant l’élément connu le plus relatés par tous en France, rien n’empêche de l’utiliser afin de faire passer un message politique viable.
Le souci avec « Athéna » est le discours qui, non seulement est douteux, mais franchement risible… Déjà, on a se tape tous les clichés, à commencer par le converti radicalisé, les ensauvagés qui beuglent comme des dératés, l’arabe militaire bien intégré, ses frères : un dealer immoral totalement taré et un autre criant vengeance contre la police assassine.
En réalité, le film est quasiment la vision de la banlieue propagée par Damien Rieu, à deux doigts de l’adaptation de « Guérilla » d’Obertone. Évidemment, je dis ça, car le film ne raconte strictement rien mise à part l’émeute et la violence très esthétisé. Si encore, ça racontait quelque chose, si encore, les personnages avaient de l’importance, un caractère, une âme, qu’on en ait quelque chose à foutre de leur sort. Mais non, rien. Des barbares sans fond. Qu’on ne vienne pas me parler des trois frères et leurs liens filiaux à peine visible qui les unis, l’aspect tragédie grecque est loupé à 100%. Rien ne va.
Mais le pire est à venir. En général – on le sait – les émeutes en banlieue sont la conséquence de bavures policières, dans l’entière majorité des cas. Et bien figurez-vous que Gavras, certainement gêné d’avoir montré la banlieue vu par la droite radicale durant 1 h 30, se rattrape in extremis en nous expliquant que c’est un groupuscule d’ultra-droite qui, après s’être déguisé en policier, est allé tuer le jeune afin de déclencher la guerre civile. M.D.R ! Non seulement ça tient du conspirationnisme le plus ridiculement stupide, mais en plus, ça annihile totalement la question politique de la violence d’état et les abus perpétrés par la police française.
C’est sublime. On a un film vendu comme « de gauche » sur la banlieue, dont une partie non-négligeable attendait un brûlot anti-flics, tandis que d’autres petits-bourgeois tout contents de bander fort sur la violence des cités. Les premiers se sont fait littéralement cocufiés tandis que les seconds à la culture et à l’analyse politique très limités, seront contents de voir que les méchants, ce sont les fachos, aussi satisfaits que tous les centristes... La police républicaine est sauve, ce n’est pas elle qui fait des bavures, mais des nazis qui se déguisent en flics. C’est tellement douteux que ça en devient gênant, cette ignoble lâcheté dans le propos au goût de merde, passera très bien chez les adolescents en manque de sensations fortes.
Sinon, sur l’aspect formel, Gavras est en pleine obsession sur les plans-séquences qui n’ont aucune signification particulière au-delà de la volonté de les faire. Donc, aucune mise en scène réellement pensée et en cohérence avec l’action. Mais en même temps, pour qu’il y ait mis en scène, il faudrait qu’il ait un minimum d’écriture. Donc, même visuellement, le film n’est pas intéressant pour un sou.
« Athéna », c’est une partouze entre Damien Rieu, un gauchiste bourgeois bandeur de cité et le ministère de l'Intérieur en opération de blanchiment de la police. Le nouveau centrisme. Beurk !
Créée
le 25 sept. 2022
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