Il faut bien admettre l'évidence en sortant de ce "Au Cœur de l'Océan" assez décevant, Ron Howard n'est rien d'autre qu'un honorable mercenaire au service de l'industrie hollywoodienne, capable donc de produire des films moyens et moyennement consensuels sur n'importe quel sujet. Et le coup de génie - finalement inexplicable - de "Rush" ne change rien à l'appréciation globalement tiède qu'on pourra porter sur son... "œuvre". Mal servi il est vrai ici par un script médiocre (aucun approfondissement de l'antagonisme entre le capitaine et son second, aucune empathie vis à vis de personnages dont on se moque qu'ils survivent ou non, un manque flagrant de prise de position entre la vision utilitaire de l'époque et la compassion écolo actuelle vis à vis des cachalots), trahi par une 3D hideuse qui dé-réalise le travail de l'image et de la mise en scène et maintient le spectateur à distance du récit, Howard peine à sauver les meubles avant de finalement lâcher prise dans la dernière partie du film : il édulcore le calvaire de ses naufragés et nous plonge du coup dans un ennui poli, que les quelques stéréotypes finaux sur le pouvoir et l'argent transformeront en irritation. Bref, entre un Hemsworth caricatural en diable et un Brendan Gleeson sous-employé, avec des effets spéciaux médiocres (faute de moyens ?) et une direction artistique conventionnelle (musique insupportable et esthétique brumeuse stéréotypée), "Au Cœur de l'Océan" épuise vite son capital de sympathie, généré par l'évocation de la genèse du chef d’œuvre qu'est "Moby Dick". Mieux vaut 100 fois revoir "Master and Commander". [Critique écrite en 2015]