Expérience assez fascinante que ce film "documentaire" de Werner Herzog.

En reprenant les archives du couple Krafft, il propose de tirer non seulement un "Requiem" en leur honneur, mais aussi d'explorer ces images pour ce qu'elles nous disent de la vie, de la mort, et de l'aventure. Le film vaut le coup ne serait-ce que pour les images fascinantes, hypnotiques, grandioses, les qualificatifs manquent, qu'ont filmé Katia et Maurice Krafft tout au long de leur carrière, et ce à une époque où les conditions matérielles faisaient de ces films une véritable épopée physique. Il se révèle dans ces archives un sens de l'image, du plan fixe absolument soufflant.


Là où le bat blesse, c'est dans la voix-off franchement ridicule de Werner Herzog. D'abord, le choix de l'anglais est probablement en cause : on sent bien que ce n'est pas la langue maternelle du réalisateur, et ses commentaires sont parfois assez rudimentaires. Tout le film nous est expliqué, narré, commenté par des prises de paroles dont on aurait pu dans l'immense majorité des cas se passer. Le rôle du narrateur est assez difficile à suivre : ici, il donne quelques explications géographiques, là, il commente les images comme s'il les découvrait, là encore, il se lance dans des grandes comparaisons poétiques. On a plus l'impression d'être face à une version commentée d'un film muet.

Dernier point, les choix de musiques sont des plus déroutants. Fauré, cantates baroques, musiques et chansons traditionnelles... Tout se mélange et colore de manière très étrange les images des Krafft. Après une séance d'éruption sonorisées par les grandes Orgues, il vient soudain à Herzog une vision, une grande idée : ces images d'un village dévasté par l'éruption du Nevado del Ruiz ressemblent un peu à des images de Western Spaghetti. Et hop ! C'est parti pour 10 minutes de plans sur des ruines, des animaux ensevelis, étouffés et agonisants, des restes de vies brisées et des survivants se démenant au milieu, le tout assaisonné d'une guillerette petite chanson aux couleurs "locales". On ne comprends pas.


Quel dommage, car le film est une claque visuelle, évite soigneusement le poncif des amoureux morts l'un dans les bras de l'autre, et que sur beaucoup de points, Herzog a raison : il y a là quelque chose de profondément vertigineux qui dépasse largement les volcans et nous interroge, par images subliminales, sur la vie, la mort, la création des choses et l'imminence de leur disparition, comme dans ce plan final incroyable où Maurice Krafft filme, marchant sur le fil du précipice, le bord d'une route à moitié effondrée.

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le 16 janv. 2025

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