3ème film d'Abbas Kiarostami que j'ai eu l'occasion de voir, et de nouveau une belle petite surprise. Toujours avec son style si particulier mis en pratique, qu'il n'est jamais aisé d'appréhender.
Pour des soucis d'approche artistique, le cinéaste a choisi de se placer au plus près du réel, comme ce fut également le cas dans "Le Vent nous Emportera". Tous deux sont relativement proches du genre documentaire, pour procéder à une remarquable mise en abîme de l'art cinématographique, parfois elle sera suggérée, ici elle sera frontale. Vous l'aurez compris, vous allez suivre quelques péripéties d'une équipe de réalisation, débarquant directement sur le terrain pour recruter leurs acteurs avant le tournage, dans un petit village du nord de l'Iran.
Attention, ici il n'est pas question d'une quelconque recherche d'exhaustivité, concernant l'élaboration d'un long métrage, seulement l'occasion d'aborder en arrière plan du récit une réflexion sur la captation du réel, ainsi qu'un questionnement sur ce que représente le cinéma pour les gens ordinaires. Cette intention s'effacera donc rapidement, pour laisser plaçe à une histoire aussi belle, aussi simple, aussi sincère que la vie elle-même. Dans le cadre de ce film, il se trouve que l'acteur principal, recruté sur les lieux, devra donner la réplique à une fille du village dont il est tombé amoureux depuis longtemps.
Jugé trop pauvre, trop bête car illettré et inéduqué, il devra encaisser refus sur refus quand il demandera sa bien-aimée en mariage, par l'intermédiaire de ses proches. Au sein de ce lieu récemment perturbé par un tremblement de terre, cette chronique villageoise, étonnante comédie des moeurs iraniens, explorera les légers boulversements dû à l'arrivée de l'équipe, puis jouera le rôle de révélateur des séquelles de la catastrophe. Malgré tout, le jeune homme s'obstinera à convaincre celle qu'il juge comme l'élue de son coeur, de s'opposer aux convictions de sa famille.
Comme toujours, Kiarostami ne nous ménage pas de magnifiques envolées poétiques dans les paysages et dans les chemins. Bavard tout le long avec d'innombrales dialogues, l'auteur nous proposera une fin ouverte beaucoup plus calme, beaucoup plus émouvante, au cours d'une séquence finale époustouflante. Le jeune homme s'avance aux travers des oliviers, aux travers des barrières morales, à la poursuite de la jeune fille aux pas assurés. Les deux personnages s'éloignent de plus de plus dans le cadre, jusqu'à disparaître, sans pour autant que le spectateur ait eu la certitude que le garçon ait obtenu le consentement tant convoité. Le tout sur un bel air de musique classique. Si c'est pas beau ?
Pas certain que ce soit le Kiarostami le plus accessible, et donc le plus propice pour approcher le travail de son auteur. Pour ceux qui seraient interessés, je vous conseillerais d'avantage de commencer par "Le Goût de la Cerise" donc je vous joins le lien direct vers ma critique plus succincte, puis un autre lien vers ma critique plus détaillée du "Vent nous Emportera", du même auteur.
http://www.senscritique.com/film/Le_Gout_de_la_cerise/critique/30609238
http://www.senscritique.com/film/Le_Vent_nous_emportera/critique/31512947