De l'autre côté
Le public français se prépare à découvrir le nouveau film de Jafar Panahi dans un contexte particulier. Le 11 juillet dernier, le réalisateur iranien est arrêté et condamné à une peine de six ans...
le 13 nov. 2022
8 j'aime
3
Malgré les interdictions gouvernementales qui pèsent sur sa personne, Jafar Panahi dirige un tournage à distance depuis un petit village isolé, situé à quelques kilomètres de la Turquie.
Zara est ravie. Bakhtiyar, son compagnon, vient de lui dénicher un passeport volé qui lui permettra de s’expatrier. Mais en découvrant que l’homme qu’elle aime ne s’enfuira pas avec elle, la jeune femme déchante. Coupez ! Un travelling arrière traversant l’écran permet au réalisateur iranien d’apparaître dans le cadre. Ainsi le couple en crise est formé de comédiens. Mais la fiction qu’ils nous dévoilent finira par raconter leur propre histoire, tout en faisant échos aux sentiments déchirés de deux villageois. Ce sont là les prémices d’une mise en abyme vertigineuse qui ouvre de multiples tiroirs. Quant à Panahi, privé officiellement de caméra, il parvient néanmoins à se filmer les deux pieds sur la frontière. Devant lui, la liberté. Derrière, son pays de cœur en pleine souffrance. La séquence est puissante, ironie mordante ou farce si cruelle.
« Should I stay or should I go », telle est la question. Partir, c’est mourir un peu. Rester, c’est également succomber. Une fois de plus, le cinéaste se met en scène. Egocentrisme ou culte de la personnalité ? Sa situation précaire qui l’a mené aujourd’hui en prison est cependant révélatrice de l’état pitoyable dans lequel s’enlise la République islamique. Entre religion exacerbée, traditions archaïques, autoritarisme inique et oppression des femmes, cette terre, épouvantée par une image, une photo, s’avère bien incapable de retenir ses propres enfants. Le constat est cinglant et ne laisse guère d’espoir. Il rappelle l’IRM de Cristian Mungiu diagnostiquant les pathologies de la société roumaine, voire européenne. Lui aussi en appelait à l’ours pour signifier les peurs intrinsèques qui immobilisent et dévorent les peuples.
(7/10)
twitter.com/cinefilik
Créée
le 31 déc. 2022
Critique lue 22 fois
1 j'aime
D'autres avis sur Aucun ours
Le public français se prépare à découvrir le nouveau film de Jafar Panahi dans un contexte particulier. Le 11 juillet dernier, le réalisateur iranien est arrêté et condamné à une peine de six ans...
le 13 nov. 2022
8 j'aime
3
Panahi abandonne la ligne claire qui faisait la beauté de Trois visages et opte pour une construction labyrinthique dont lui-même serait le point pivot. Et c'est là que le bat blesse : le personnage...
Par
le 13 oct. 2022
6 j'aime
Un film à l'aspect très simple, mais à l'intrigue finalement bien plus complexe quil ne paraît, avec son jeu entre réalité et fiction , film dans le film, lien avec la situation du cinéaste, qui...
le 1 déc. 2022
5 j'aime
Du même critique
Mathieu vient tout juste de retrouver Anna, son ex-femme, et Sarah, leur enfant-bulle, quand un tremblement de terre secoue Paris. Une brume menaçante envahit la capitale. Comment survivre ? Colère...
Par
le 7 avr. 2018
10 j'aime
6
Désirant marquer l’histoire à la hauteur de ses moyens, un millionnaire décide de financer un film. Il engage Lola Cuevas, cinéaste en vogue, qui réunit pour la première fois sur un plateau Felix...
Par
le 23 mai 2022
9 j'aime
La vie pour Antoine, le célibataire, c’est du champagne à gogo, des bombances jusqu’au matin et un défilé de filles en chambre. Mais quand son colocataire le quitte pour New York, laissant sa place à...
Par
le 23 mars 2018
9 j'aime
2