Robert Wise fidèle à lui-même : encore un film dans un registre clairement différent des autres, et encore un savoir-faire évident. C'est une qualité remarquable, sans jugement de valeur : on pourrait très bien voir dans cette application et dans cet éparpillement les caractéristiques d'un faiseur hollywoodien des plus impersonnels...
C'est cette fois dans un registre proche du fantastique, sans y aller franchement, que le réalisateur américain s'investit. Mais le genre n'a pas ici de contours bien définis : c'est au contraire un jeu auquel s'adonne cet "Audrey Rose" pendant une bonne partie. On part sur les rails d'un thriller étrange, estampillé "production 70's", pour terminer sur du fantastique aux parfums de réincarnation, en passant par le drame familial pur et dur. Les auteurs semblent s'être fixé comme cahier des charges de rester en dehors de toute catégorie bien définie, et cela fonctionne bien, dans une certaine mesure : on ne sait jamais comment aborder la scène à venir. La séance d'hypnose est à ce titre troublante, quand bien même on sentirait où on nous amène. Sa conclusion est par contre surprenante, dure, froide, radicale.
Robert Wise avait déjà investi le genre purement fantastique avec "La Maison du diable", mais les passages flirtant ici avec ce genre n'ont rien à voir. Il ne s'agit pas d'une maison hantée, mais plutôt d'un corps hanté. À partir d'un certain moment, "Audrey Rose" dérive un peu trop franchement vers un besoin de trancher, de statuer sur la notion de réincarnation, et rate le coche du mystère pour se perdre dans des élucubrations spirituelles assez pauvres. La prestation de Anthony Hopkins demeure, cependant, et son intervention en début de film sonnant la fin de la partie thriller conserve un forme de singularité savoureuse.
[AB #148]