Alice Winocour, pour son premier film, nous emmène avec elle dans un Paris alternatif. Un Paris gothique à l’architecture presque victorienne où les malades sont des bêtes de foires. Une époque sombre de la médecine qui tente par tous les moyens de progresser et d’évoluer sans vraiment savoir quel chemin prendre. Ce que la réalisatrice nous représente à merveille, c’est cette sensation d’immobilité dans le progrès ; une fixité radicalement mise en avant qui se confronte à la gestuelle et la vivacité que donne Soko à son personnage. Tous autour d’elle sont totalement froid et sans vie. Augustine représente la sensualité, la sexualité libérée qu’ils n’auront jamais et ils l’observe gesticuler sur le sol avec envie et jalousie.
Au milieu de cette brume épaisse qui entoure la science de la même façon qu’elle englobe le film, Charcot nous est présenté comme le sauveur : capable de soigner les maux de sa patiente comme ceux de son époque. Cependant, sa façade de bon médecin aimant s'efface vite et laisse apparaitre un personnage arriviste qui le replace aussitôt dans les rangs. C’est cette reconstitution de l'archaïsme qui fait la force du film et le démarque du très décevant A Dangerous Method de David Cronenberg qui n’avait pas la puissance de son ambition de par sa représentation trop en surface.

Malheureusement, malgré cette minutie et ce soucis du détail, Alice Winocour peine à nous garder avec elle jusqu’au bout. Les personnages ne sont intéressant que dans leur contexte sans jamais vraiment se démarquer individuellement : Augustine n’est qu’une hystérique parmi tant d’autres comme le souligne les séquences « entretien » et on reprochera au personnage de Charcot de n’être présent que pour faire avancer l'intrigue. On regrettera également le manque d’appuie sur le personnage de Chiara Mastroianni qui se démarquait parmi les seconds rôles mais qui n’aura jamais l’importance de nos espérances.
A vouloir trop s’attacher à la perfection visuelle et contextuelle, le scénario manque cruellement de dynamisme. Les crises d’hystérie semblent répétitives et on gardera plus volontiers une vision du film comme un tout que des moments marquants détachés les uns des autres.
On relèvera tout de même la séquence du singe qui se pose comme l’exception. Mais, malgré sa force et son charme qui la détache du lot, cette dernière se dessine comme un climax arrivé trop tôt. Alice Winocour le reconnait : « (...) la scène où ils baisent, c’est la scène du singe (...) 1». De fait, ce passage a un impact bien plus important chez nous qu’en a la scène finale. Il représente l'apogée de la relation qu’entretien Augustine avec Charcot et la suite peine à préserver la même sensation si bien qu’on attend impatiemment la conclusion. Cela rejoint l’idée d’Hitchcock qui s’arrangeait toujours pour ne pas tout dévoiler d’un seul coup : il faut garder sa carte maitresse pour le grand final.
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le 29 nov. 2012

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