C'est un article de Frodon (le critique, pas le Hobbit) qui m'a appris l'existence de ce film. Il en disait qu'il avait « une exceptionnelle capacité à exister simultanément avec l'acuité d'un regard sur le réel d'autant plus affermi que la menace est imminente. » Si je me limite à la première moitié de cet "Aujourd’hui", j'adhère à la vision de Frodon. Dès le premier plan, une intrigue est posée, un regard nouveau s'offre à nous. Alain Gomis n'est pas un génie plasticien, mais il a un vrai sens du cadre, du montage, du son... Bref le bonhomme sait faire parler l'image en sachant justement faire taire ses personnages. En n'expliquant jamais vraiment de quoi il est question, en naviguant parfois dans une sorte d'irréalité, "Aujourd’hui" parvient à créer ce que je recherche au cinéma : de l'intrigue, de l'interrogation, de la poésie... Mais bon... Ce que je trouve dommage, c'est d’abord que le film manque clairement de moyens formels : une belle photo aurait aidé ce film dans sa démarche empirique. Ensuite, j'avoue que le Lynchéen que je suis aurait aimé que Gomis entretienne davantage l’ambiguïté de son intrigue : le passage à l'hôtel de ville ou chez l'oncle ont fonctionné à mort sur moi parce que justement je ne savais pas trop si le film allait réellement s’affranchir d'une logique purement factuelle pour céder pleinement à de la pure expérience formelle. Malheureusement, la deuxième moitié du film n'apporte pas la réponse que j'aurais voulu. N'ayant pas osé/voulu/pensé le saut dans l'expérimentation formelle, le film sombre vite dans une démarche répétitive et lassante. Certes, il y a toujours la recherche d'un autre regard, mais en réutilisant les mêmes méthodes qu'en début de film, sans dynamique ni renouveau. Au final, je suis ressorti de ce film un peu fourbu, car la dernière demi-heure m'a quand même pas mal barbé. Mais bon, je retiens quand même de sacrés bons moments et – au final – je ne regrette pas du tout le déplacement. A vous de juger maintenant si vous êtes prêts à tenter l’expérience...