Preminger convoque au prétoire justice des hommes, acte de parole et illusion de vérité. Un noir et subtil jeu de stratégie et d’influence. Un rôle magistral pour James Stewart et également pour une sensuelle et fascinante Lee Remick, dans un film noir d’Otto Preminger. Un film excellent qui ne fait pas tant l’autopsie d’un meurtre que celle de la machinerie judiciaire et de ses ressorts psychologiques (doute, culpabilité ou innocence, le rapport entre parole et subjectivité de la vérité). On suit donc les péripéties d’une énigme durant le procès sans voir les délibérations, les plaidoiries, mais à travers une étude de personnages, leurs failles et ambiguïté, leurs motivations obscures, parfois même suscitant peu d’empathie, cela jusqu’à la fin du film où se questionne notre intime conviction. Preminger décortique les témoignages la procédure judiciaire, la vérité n’étant qu’illusion en lien avec le talent des joutes oratoires, voire le jeu de manipulation, de pouvoir de persuasion des avocats des 2 parties. La pratique de la parole de l’avocat , parole aussi faillible soit elle, est ici un acte qui s’impose dans le processus de reconstitution des faits. C’est aussi un film aux échos très actuels (misogynie des hommes où la femme violée devient l’accusée, responsable du crime, parce qu’elle est belle, libre et séduisante). La vérité étant de moins en moins objective au fil du film , des zones d’ombres subsistent sur les motivations de l’accusé et de sa femme…Mais c’est un plaidoyer pour la justice où il vaut mieux innocenter un coupable que condamner un innocent .