Un jeune génie de l'informatique a réussi à pirater toutes les caméras de surveillance et toutes les webcams de la capitale. Lorsqu'un attentat est déclenché gare d'Austerlitz, il découvre qu'il connaît un couple impliqué dans l'affaire. La version officielle du gouvernement, l'attentat islamiste, est un gros mensonge. Notre justicier entend faire éclater la vérité.
L'idée intéressante était de réaliser un long métrage entièrement basé sur des images vidéos captées à l'insu des protagonistes. C'est ce qui distingue ce Aux yeux de tous du tout venant. Car pour le reste, uniquement du déjà vu. Le complot ourdi par une ambassade étrangère au service du gouvernement français qui saura bien renvoyer l'ascenseur. Les grands menteurs au sommet de l'Etat. Le jeune couple utilisé sans scrupule pour effectuer la basse besogne. Et les porte-flingues qui vont bien. Quant au prodige du hacking, Jimenez et Duprey lui ont fait revêtir la panoplie attendue : bonnet sur le crâne, tee-shirt, baskets ouvertes aux pieds, pizza pour se nourrir. Le tout filmé en gros plan sur ses yeux ou ses mains qui pianotent. Les bonnes vieilles recettes sont aussi sollicitées : épingles sur un plan de Paris, photos punaisées au mur avec des post-it, flèches pour les relier avec des points d'interrogation. Les dialogues et l'interprétation sont au diapason : assez clichés, Olivier Barthélémy et Mélanie Doutey s'agitant beaucoup sans convaincre.
Du réchauffé donc, de surcroît lesté de problèmes de crédibilité.
Sur l'intrigue d'abord : on ne saura jamais comment notre hacker a pu reconnaître le couple en question. Le lien avec le vilain Otar est fait à la fin du film : la mère du hacker était la secrétaire dudit Otar. Il subsiste malgré tout des trous dans la raquette pour remonter jusqu'à l'attentat. Jimenez et Duprey n'en ont cure puisqu'ils ont choisi de ne pas détailler la préparation de cet attentat : Aux yeux de tous se concentre sur le présent, les jours qui suivent. Un choix plutôt judicieux.
Crédibilité du dispositif ensuite : allez, je ne suis pas connaisseur donc admettons qu'on puisse accéder à tous les systèmes de vidéosurveillance, ceux des hôpitaux, des commissariats et des bus. J'ai un doute, mais admettons. Par contre, toutes les caméras sont mobiles, notre héros peut carrément les manoeuvrer et il y en a toujours une pour se trouver dans l'axe souhaité ? Exemple de la conversation sur le banc d'un parc ? Personne, dans ce milieu de magouilleurs, ne se doute qu'un téléphone vous permet d'être suivi à la trace, voire écouté ? Personne ne sait qu'une webcam peut être activée à distance et à son insu ? Heureusement qu'il y a le film de Jimenez et Duprey pour ouvrir les yeux à tout ce beau monde....
Assez banal tout en étant invraisemblable, donc. Nous ne sommes pas sur l'étiage le plus haut de Jimenez : un cran en-dessous de La french ou de Bac nord. Reste qu'il parvient à tenir son parti pris, du moins jusqu'à la toute fin, qu'on pourra regretter : on découvre notre jeune héros, capté ni par une caméra de surveillance ni par une webcam. Mais il fallait bien révéler que sa mère était la secrétaire d'Otar... La réflexion sur l'impuissance de ces "anonymes" à agir sur le réel est intéressante, l'homme de l'ombre qui semblait tirer toutes les ficelles se révélant incapable d'éviter l'hécatombe qu'il voit arriver. C'est à peu près tout : en tant que film politique, Aux yeux de tous est bien trop faible pour faire date. Bien trop bateau pour faire mouche. Même si le film se déroule à Paris.