Si vous avez des problèmes, n'appelez pas la police. N'appelez pas
l'hôpital. N'appelez pas votre avocat. Appelez Howard.
Ceci était le conseil donné par le studio MGM à ses stars durant l'âge d'or hollywoodien. Quant à l'homme mentionné dans la tirade, il s'agit de Howard Strickling. Occupant le poste de directeur de publicité mais aussi et surtout celui de fixeur, ce dernier était chargé de couvrir les scandales des stars afin d'éviter que ceux-ci ne ternissent l'image du studio. Et à Hollywood, Strickling était loin d'être le seul à exercer cette profession. De fait, il y eut également Eddie Mannix qui fut l'un des hommes de l'ombre les plus efficaces que Los Angeles ait connu. S'il fallait cacher une grossesse ou graisser la patte à la police pour relâcher une star en état d'ébriété, on pouvait compter sur lui. À coups de pots de vins et d'arrangements, Mannix lavait de leur pêchés les travailleurs du studio, préservant ainsi l'immaculée Hollwyood et son studio system.
Et si dans les années 30-40, ledit studio system fonctionnait plutôt bien, il devint, à l'aube des années 50, un gigantesque brasier. En effet, avec ses acteurs s'émancipant de plus en plus des studios, la perte de contrôle de ses salles de cinéma, la montée du communisme et l'apparition du média concurrentiel que constituait la télévision, Hollywood se transforma peu à peu en une machine folle, obligée de produire des films de plus en plus spectaculaires pour conserver sa magnificence.
C'est dans cette période pour le moins trépidante que les Coen décident donc de planter l'action de Hail Caesar. Derrière une histoire délirante de kidnapping, les Coen en profitent pour dresser une satire des coulisses d'Hollywood, brassant de cette manière de nombreux thèmes ( allant de la chasse à la sorcière rouge à la production d'un film). Ainsi, les Coen suivent, dans les dédales de studios lourds et oppressants, le fameux Mannix qui traverse les plateaux de tournage comme l'on traverse les différents genres hollywoodiens. On assiste alors à de délicieuses scènes pastiches de comédies musicales, de westerns, ou bien encore de péplums, le tout avec un délicieux travail sur la couleur renvoyant à la si belle technicolor.
Les personnages sont, quant à eux, interprétés par des acteurs en grande forme, dont notamment Scarlett Johansson, jurant comme Joan Crawford, et qui se retrouve confrontée à un problème de grossesse similaire à celui de Loretta Young. Nous avons également l'acteur de western Alden Ehrenreich qui quitte sa contrée du Far-West pour le milieu mondain de Hollywood et qui ressemble, de par sa situation, sa gentillesse et sa naïveté, à une sorte de héros des films de Capra.
On le sent donc à travers leurs multiples références, les Coen sont des amoureux du cinéma hollywoodien mais restent cependant lucides et critiques par rapport à cette machine de production et n'hésitent pas à en montrer les recoins sombres. Ainsi, ils dépeignent celle-ci comme étant un repère où règne le vice et la décadence et dans lequel le travail des artistes est spolié et aseptisé.
Cependant, malgré ses nombreux défauts, Hollywood continue encore de faire rêver les spectateurs dans le monde entier. Et cela, c'est tout simplement parce qu'elle est la seule qui arrive à transmettre tant de magie et de beauté à travers ses films et ce, grâce à la dévotion que lui portent des hommes de foi tel que Mannix.