Avengers par toma Uberwenig
Pourquoi personne (bon, je n'ai pas lu toutes les critiques du site en même temps...) ne parle du comics qui sert de matrice au film, la série qui redonne vie à Marvel, The Ultimates ?
Peut-être parce que la filiation est tellement évidente qu'on ne prend pas la peine de la mentionner... ou parce qu'on considère que ce n'est pas un élément prépondérant.
Et pourtant, de même que The Ultimates a révolutionné Marvel dans son entier (les séries estampillées "ultimates" prennent place à la base un univers autonome ancré directement dans notre réalité, mais l'ensemble de l'univers Marvel aura finalement été secoué, retournant la plupart des séries de l'univers "classique", les rendant plus dures, plus réalistes, plus matures), The Avengers réussit une prouesse analogue dans le monde du film de superhéros, en lui donnant l'épaisseur qu'il lui manquait, et en lui offrant la dimension épique qui malheureusement faisait défaut à la plupart des productions de la Maison des Idées.
Chaque épisode des Ultimates était une double claque, la maturité du scénario, la finesse avec laquelle les personnages étaient définis, entre un Captain America tout à fait cohérent dans son conservatisme bien à droite datant d'une autre époque (forcément), un Tony Stark saturé de fissures, dépressif, suffisant, alcoolique, tête brulée (et accessoirement génie), un Thor qui se prend pour un Jesus bodybuildé, et qui n'a aucun moyen de prouver sa divinité et que les autres prennent pour un schizophrène avec un gros marteau...etc. Bref, tous les personnages ont leur part de vanité, d'ombre, et la façon frontale d'embrasser les thèmes donne littéralement une seconde vie, bien plus profonde, à une des équipes les plus kitsch de l'histoire du comics.
Une mention spéciale à Oeil de Faucon qui devient crédible pour la toute première fois depuis sa création.
Mais évidemment, sans les planches magistrales de Brian Hitch pour illustrer les propos incisifs de Mark Millar, ça ne fonctionnerait pas aussi bien. Car Hitch est un grand malade, qui termine son run de la série en ne dessinant que des pleines pages, réductions de fresques quasi murale, saturées de détails, baignées dans une dynamique épique. D'où le temps d'attente terrible entre les derniers épisodes (parfois plus de 6 mois!! Pas mal pour un mensuel, non ?)
Pourquoi m'étendre sur le comics ici ? Tout simplement parce que tous les films pré-Avengers flirtaient déjà, souvent timidement, certes, avec la série. Tout ce qui est bon dans ces films oscillant entre le médiocre et l'acceptable (avec quelques pointes de bon) était tiré directement du comics. Mais de façon trop sporadique pour qu'on puisse affirmer que The Avengers serait un Ultimates Avengers.
Fort heureusement, le film vient combler les attentes, balayer les craintes en offrant on ne peut plus clairement un hommage au travail de titans du duo Hitch-Millar, réussissant même la prouesse de transposer en mouvement la dimension épique des fresque de Hitch lors de l'affrontement final.
Certains ont dit que The Avengers, c'est une heure et demi d'intro pour une scène de combat final longuette.
Je plains un peu ceux qui sont passé à ce point à coté du film.
Je plains aussi un peu (mais moins) ceux qui ont abordé le film sans être marqué au fer rouge par les Ultimates, car leur plaisir s'en retrouve nécessairement un peu amoindri. Mais pas suffisamment pour qu'on puisse parler de gachis. Simplement, il est vrai qu'il est difficile d'apprécier Loki si l'on n'a pas goûté à sa performance sur papier, le Loki à l'écran gagnant en épaisseur par jeu de miroir et de résonance.
Mais bref. Je me souviens du frisson que j'éprouvais en regardant le trailer de Transformers 3, avec sa gigantesque limace mécanique et la cruauté des adversaires. Mais la platitude du résultat final était sans appel.
Et c'est The Avengers qui m'aura finalement offert le souffle épique que j'attendais d'un vrai film d'action, d'un vrai film de Super Heros.