Film tourné dix ans après la fin du conflit algérien, Avoir 20 ans dans les Aurès, est un film qui a longtemps dérangé.
Tourné à partir des témoignages de nombreux appelés, le film retrace l’itinéraire d’un groupe de jeunes bretons pacifistes qui, à force d’endoctrinement, vont devenir des tueurs et des tortionnaires. Et c'est ce qui est réussi dans ce film.
En début de film, on est pris de sympathie pour ses soldats un peu réfractaires et pacifistes, avant de les voir petit à petit changer. Le changement intervenant petit à petit, on est d'abord surpris par leur revirement, puis consterné, avant de finir à la limite de la nausée.
Montrant toutes les contradictions de l’armée française de l’époque, ce film fut censuré en 1972, année de sa sortie. Un attentat à la bombe eut même lieu devant une salle de cinéma ayant décidé de projeter le film malgré tout (preuve que même dix ans après le conflit, le climat n’était pas apaisé).
En dépit de la censure, Avoir 20 ans dans les Aurès sera tout de même distingué par le prix de la critique au festival de Cannes.
La guerre d'Algérie, c'est un peu le Vietnam français. Les deux guerres sont contemporaines, et c'est en Algérie que le napalm a été utilisé pour la première fois (triste cocorico), si on veut pousser la comparaison. Sauf qu'on ne l'a pas exorcisé comme ont pu le faire les cinéastes américains.
De ce point de vue, la production française est timide, et mis à part ce film, et l'ennemi intime, de Florent-Emilio Siri, pas grand chose à se mettre sous la dent en France.
Un film à redécouvrir donc, tant pour son contenu que pour ce qu’il représente en terme de travail mémoriel.
P.S. : D'ailleurs, pour l'anecdote, on notera que le premier film sur la guerre d'Algérie ne sera pas le fait d'une production française, mais italienne, avec la bataille d'Alger, de Gillo Pontecorvo (1966), film qui sera d'ailleurs interdit en France à sa sortie et restera censuré jusqu'en 2004.