Une jeune photographe très ancrée dans les salons artistes / révolutionnaires, est abordée un soir par une mystérieuse femme, riche et solitaire. Dès lors, plus rien ne va. Son appareil photo semble devenu une arme mortelle, elle est hantée par des rêves qu'on croirait écrits à quatre mains par Freud et Jess Franco, et se sent attirée irrésistiblement par la vieille femme.
Sur ce point de départ assez simple, Baba Yaga développe un scénario plein de surprises, qui nous trimbale aux quatre coins des fantaisies de l'auteur. Cela commence comme un décalque pop de Blow Up, et ça finit comme un Elvifrance (bondage et flagellation compris), en passant par le film social ou l'épouvante gothique. Loin de fatiguer, ce petit jeu constant avec les attentes dynamise un récit en fin de compte assez sommaire, mais porté par des personnages et acteurs attachants (George Eastman en tête, qui prouve encore une fois son réel talent d'acteur).
En parlant de dynamisme, impossible de ne pas citer le montage remarquable du film, qui, lors des visions oniriques de l'héroïne, mêle clichés instantanés, relectures de scènes passées, extraits de la BD originale*, etc... pour un résultat percutant et intriguant. La musique, signée Piero Umiliani, grand artisan des bandes originales italiennes de l'époque, oscillant entre groove et stridence contribue également à ce sentiment d'instabilité permanente.
Foutraque et réjouissant autant que méconnu, Baba Yaga est un vrai plaisir pour les érotomanes et cinéphiles de tout crin, laissant beaucoup de questions en suspens (pourquoi des nazies dans les visions de l'héroïne ?), sans pour autant créer de frustration, tant on touche presque ici au surréalisme.
*Le film ne s'inspire pas vraiment du mythe russe de la sorcière Baba Yaga, mais de la bande-dessinée de l'un des plus fameux représentants des fumetti italiens, Guido Crepax, dont les superbes planches parsèment le film.