Si dans l'animation proposée par Baby Boss, il est dur dur d'être bébé, ça l'est encore plus dans la réalité d'un trentenaire, qui l'a dépassée depuis belle lurette, de venir en solitaire et de payer sa place pour ce genre de divertissement pour enfants en bas âge. Surtout quand, dans les yeux des parents bien propres sur eux qui les traînent à la séance (pleine) de 18H30 (!), ledit trentenaire lit la réprobation que l'on réserve aux supposés pédophiles pris en flagrant délit de viol de leur obligation de pointage au commissariat... Se mettre au deuxième rang pour essayer désespérément d'avoir un semblant de calme n'aura pas suffi, d'autant plus que Behind avait oublié que les modèles réduits, ça s'agite constamment et qu'ils ont la vessie très faible. Misère...
D'autant plus que ce que Baby Boss propose, finalement, la moitié passera certainement au dessus de la plupart des têtes blondes. Car si la bande annonce laissait augurer un spectacle tristement inoffensif et très premier âge, le nouveau bébé des studios DreamWorks se lit presque de manière littérale comme une critique de la politique d'entreprise et du monde du travail basé sur la compétition et le résultat.
C'est là que Baby Boss séduit le plus, quand il double son scénario high concept, bouleversant la vie d'un enfant par l'arrivée de son nouveau petit frère, de cette satire comportementale assez intelligemment menée, assez caustique sans pour autant être agressive (les enfants regardent), qui ira subvertir jusqu'aux ultimes images d'un happy end guère dupe de sa codification.
Alors oui, DreamWorks ne peut s'empêcher de faire étalage de son message parfois puéril sur l'amour qui ne se mesure pas et n'est donc pas divisible, en forme de passage obligé bon teint afin de ne pas effrayer les parents qui allongent les biftons et les laisser dormir d'un oeil distrait. Mais ils rateraient les désormais habituelles références cinématographiques en pagaille, entre Indiana Jones, Mission : Impossible ou L'Exorciste, assez bien amenées pour la plupart et donnant naissance à quelques sourires francs qui se dessineront sur des visages satisfaits du spectacle proposé.
Mais ces derniers rateront surtout l'hymne à l'imaginaire juvénile que propose Baby Boss, qui projette des petits épisodes de la vie quotidienne des enfants dans un contexte de rêve et de folles aventures qu'eux seuls sont capables de créer et de faire vivre. Si les décors de ses séquences sont parfois assez sommaires, elles restituent à merveille ces mondes alternatifs de l'enfance exubérante, tout en proposant certaines images en forme de pur moments d'angoisse light, ou encore des séquences originales, comme tout droit sorties d'un livre pop up. DreamWorks, pour coller à cet univers déformé par la vision enfantine, fait baigner le tout dans une atmosphère ultra sympathique et attachante de douce folie, le temps de quelques courses poursuites rythmées et échevelées, assez originales dans leur traitement.
Le tout, et sans en avoir trop l'air, en faisant évoluer un gamin qui, tout simplement, grandit, passant d'un égoïsme assez naturel de fils unique aux sentiments fraternels partagés, le temps de quelques images assez touchantes et fugitives.
Sans être le film de l'année, à cause sans doute d'un discours naïf qui reprend parfois ses droits et d'une fin qui tire un peu en longueur, Baby Boss s'avère être une jolie surprise d'une qualité à laquelle on était loin de s'attendre, surtout au vu de quelques unes des dernières livraisons DreamWorks.
Behind_the_Mask, qui touche son "Boss" devant les parents horrifiés.