Il va m'être très difficile d'écrire cette critique à la hauteur de ce que Babylon m'a fait ressentir. Car pour ce genre de film, il ne s'agit que d'émotions, et vous savez comme moi à quel point les décrire s'avère finalement relever de l'impossible. Les mots me semblent insuffisants. Ceux qui se rapprochent le plus de ce que je souhaite exprimer sont probablement émerveillement, admiration, et surtout : gratitude.
Emerveillement et admiration d'abord, car ce film est d'une splendeur absolue, tant au plan visuel, qu'au plan scénaristique. Les personnages que Damien Chazelle nous dépeint respirent l'humanité, malmenés par le doute, guidés par l'espoir, transis de peur, emplis de désirs. Ils captivent le spectateur, ils s'imposent à lui, certes par leur charisme, mais aussi par leur vulnérabilité si subtilement révélée. Pas un des trois personnages principaux ne faillit à nous émouvoir. Au contraire, chacun à leur manière, révèle une part de nous-mêmes. Une part peut-être enfouie, ou oubliée, mais une part quand même. Merci déjà pour cela.
Il me semble ensuite nécessaire de m'attarder le temps d'un paragraphe sur l'extraordinaire réalisation de Babylon, qui achève d'après moi de faire de Damien Chazelle une référence, alors qu'il n'a que 38 ans et qu'on a encore tant à découvrir de ses talents. Chaque plan bluffe par sa finesse, son jeu autour des couleurs, des détails, des points de vue... Damien Chazelle semble prendre un plaisir jubilatoire à créer, à tenter, à prendre le spectateur dans un étau de lumières et de couleurs toujours si justement associées. Certaines séquences sont juste hallucinantes de grandeur, de magnificience, et en même temps de finesse. Merci donc à nouveau, cette fois-ci pour nos yeux, et nos oreilles d'ailleurs, car quelle bande-son...
L'histoire qui anime les 3 personnages principaux du film est probablement le point sur lequel je pense que Babylon perdra de sa clientèle et de ses admirateurs. Car elle n'est en soi pas particulièrement passionante. Elle se déroule avec une certaine lenteur, Damien Chazelle s'attardant parfois sur des détails scénaristiques que l'on pourrait juger inutiles à l'histoire. Ce n'est pas mon avis. En effet dans ce film, Damien Chazelle rend hommage au cinéma, et à son histoire, à ses évolutions, et aux personnages qu'il a vu naître puis mourir, qu'il a vu jubiler puis souffrir, qu'il a fait croître puis dépérir. Comme on l'entend à un moment donné, le cinéma est plus grand que toutes ces individualités, il est un art qui nous dépasse, et sur lequel l'humain n'a pas de véritable prise. C'est ce que raconte cette histoire magnifique, Babylon prenant justement son sens et tirant sa puissance et sa beauté de tous ces détails, de toutes ces scènes à première vue anodines, et pourtant si significatives. C'est l'un des nombreux enseignements que nous offre Babylon, et c'est d'après moi le plus beau, après cet hommage que Damien Chazelle rend non pas au cinéma, mais bien à la salle de cinéma.
Je ne sais pas quel est votre attachement personnel à cet endroit sublime, unique au monde, qu'est la salle de cinéma. Jamais l'existence de ce lieu si magique n'a été aussi menacée qu'aujourd'hui, vous en connaissez tout comme moi les raisons. Babylon est l'affirmation de la puissance incomparable et indétrônable de la salle de cinéma. La scène de fin du film m'a ému aux larmes, tant Damien Chazelle semble crier au secours, et semble surtout déclarer son amour passionnel pour la salle de cinéma et pour le cinéma en lui-même. Là où la salle de cinéma nous réunit, le cinéma nous transcende et nous emporte, nous êtres humains. Il nous emporte ensemble, car il n'y a qu'ensemble que nous trouvons du sens à cette expérience unique qu'est le visionnage d'un film. Alors merci Damien Chazelle pour cet hommage et merci pour ce film sublime. Ma gratitude est infinie.
Vive le cinéma.