Damien Chazelle cite-t-il toutes ses exs lorsqu'il fait des déclarations d'amour à sa femme, lui rappelant au passage qu'elles étaient mieux qu'elle ? Si l'on se fie à la façon dont-il déclare son amour au cinéma, la réponse est oui, puisqu'il passe 3 heures à citer des films meilleurs que le(s) sien(s).
Après un trop plein de romantisme avec La la land, le réalisateur a l'air d'avoir besoin de montrer qu'il peut faire tout le contraire, un peu comme quand Miley Cyrus twerkait pour s'émanciper d'Hannah Montana. Sa façon à lui de montrer comme le cinéma est beau, c'est en nous montrant, qu'on peut même filmer des chibres, du caca et du pipi. Aucun doute, dans 100 ans les cinéphiles seront envahis d'intenses émotions en regardant Margot Robbie vomir ses tripes.
Qui est amateur de cinéma des années 20 aura reconnu de nombreuses références, que ce soit les films cités ou les personnes et faits divers dont s'inspire Chazelle (Clara Bow, l'affaire Arbuckle...) mais ne verra dans cette adaptation du bouquin de K. Anger, réputé peu fiable en sources mais riches en ragots racoleurs tout aussi vulgaires que le film, aucun hommage ni à l'époque ni à son cinéma. Sans parler des incohérences esthétiques ou historiques sur l'époque mais qui ne sont pas si flagrantes que ça pour un film Hollywoodien, il faut l'admettre.
Pour continuer sur des points positifs : la bande-originale est excellente, l'entrain que créé le mélange entre les inspirations des musiques des années 20 et une bonne touche de modernité est efficace, c'est ce que Baz Lhurmann avait échoué à faire dans son Gatsby. Concernant l'humour, la réussite est notamment liée à ce qui entoure le personnage de Brad Pitt, ce qui va être contrasté avec justesse quand il s'agira de poursuivre le récit de sa destinée tragique. Le film comporte quelques belles séquences notamment celles des fêtes, au sein desquelles Chazelle ne sait cependant pas toujours quoi faire de sa caméra et nous fait plusieurs fois le même plan (flagrant avec la façon dont il filme les trompettistes.) Les trois heures passent vite grâce au rythme du film même si on se rend compte qu'au bout de 2h30, il se perd dans sa narration encore plus qu'il ne se perdait après sa première heure et demi. Car si le passage au parlant a été difficile pour les acteurs du muet, il l'est aussi pour Babylon.
On s'attache difficilement au personnage de Margot Robbie, prototype de la femme fatale (version crasseuse) qui cherche les problèmes et entraîne tout le monde dans sa chute, ce qui fait que le schéma ascension/déclin ne prend pas, même pour le pauvre Manuel, protagoniste de cette fresque. Si l’œuvre a une forme similaire à Once upon a Time in Hollywood, surgissent des séquences surréalistes complètement à côté de la plaque par rapport à ses thèmes et qui ne racontent rien (la scène du serpent, celle du mangeur de rat qui ressemble d'ailleurs à un mélange entre du Gaspar Noé et du Marc Caro...).
Le film initie beaucoup de petites intrigues centrées autour de personnages secondaires, sans grand intérêt. Si l'on peut éprouver un sentiment doux amer à découvrir l'histoire de Sydney, trompettiste noir qui évolue comme il le peut dans une époque où Le chanteur de Jazz, premier film du parlant qui comporte des représentations racistes change la donne du cinéma, quelle maladresse que de donner au personnage de Lady Fay Zhu, une artiste chinoise, des caractéristiques dignes des bras droits des méchants dans Rush Hour.